milfeuilles a écrit :
Je ne sais pas si tu parles de moi, j'ai pas bien compris l'enchaînement des messages. Mais dans le doute, quelques précisions.
Avant de faire ce métier je partais d'une volonté de rendre service, j'avais quasi pas d'à priori sur les gens au quotidien, fréquentais peu les TEC sauf à Paris où j'ai vécu plusieurs années dans l'enfer du métro, mais je le prenais pour un cas particulier très exceptionnel. Quand je prenais le train, globalement ça se passait et c'était pour le week-end ou les vacances donc bon état d'esprit.
Puis je fais ma formation, quelques incidents avec des voyageurs, concentré sur les aspects techniques, je ne prête pas trop attention. Par contre après plusieurs années de conduite et centaines de trains, automatismes du boulot obligent, je commence à observer bien plus attentivement le comportement de mes chers compatriotes.
Et là c'est le drame. Une fois que tu as vu, tu ne peux plus revenir en arrière. Alors, qu'avons-nous ?
- cyclistes et trottinestistes qui roulent pleine balle sur les quais et dans les souterrains.
- fumeurs qui fument à la porte dans le train, faudrait pas s'éloigner de deux mètres histoires de pas faire chier. Et les génies qui allument une clope à chaque arrêt qui dure 30 secondes, donc l'éteignent en catastrophe et bloquent la porte. A chaque arrêt. Chaque arrêt. Six fois de suite. Ils ne sont pas des cas isolés. Apparemment la clope ne développe pas la réflexion.
- gens qui marchent vite sans regarder sur la totalité de la largeur des quais et dans les escaliers, la marée ne laisse personne remonter facilement par exemple à l'arrivé d'un train. Tu peux être avec ton bagade de 30 kilos et tes deux gosses dans les escaliers en train de monter, si le débarquement descend, ça va être une misère, les gens ne laissent pas la place. Bordel mais marchez à droite et regardez, on ne se percutera jamais.
Les gens n'ont pas compris qu'ils n'étaient pas seuls. Pourtant ça se voit.
- gens qui bloquent les portes au départ. Soit pour attendre quelqu'un soit parce qu'ils sont dans la porte ou causent avec quelqu'un sur la quai. Mais bordel.
Ahah une fois y'a une porte qui fermait pas, passage de plusieurs annonces énervées, ça marche pas, j'y vais en mode vénère va y avoir du dégât, bon la porte était pétée, pour une fois j'avais l'air con.
- engagement alors que ça ne passe pas. Tous ceux qui rentrent dans le train alors que les gens ne sont pas encore descendus au lieu d'attendre sur le côté. Bilan: on met 3 fois plus de temps à descendre/monter et le train prend du retard à chaque arrêt. Bizarrement c'est dans les grosses villes genre Lyon ou Paris que ça se passe mieux.
Ceux aussi qui ne te laissent pas sortir alors que tu viens de fermer la porte de la cabine. Faudrait pas se pousser. Ou ceux qui foutent des bagages devant la porte alors que c'est marqué partout que non, c'est de la merde. Bah ouais c'est une porte, y'a personne qui l'ouvre.
- bruit. Pas un seul putain de voyage (et tu en fais beaucoup pour le boulot) sans un abruti au téléphone sur haut-parleur ou regardant son TikTok avec le son. Le cours en bourse des écouteurs est apparemment trop élevé. Téléphone portable partout, tout le temps. Assis ou à l'arrêt dans un coin on s'en fout, mais non, en marchant ou en restant au milieu du passage, gênant tout le monde.
- raleries. Retard, t'expliques tout bien, y'a à chaque fois des Prix Nobel qui viennent couiner. Les gros, je suis conducteur, c'est pas moi qui gère le trafic et créé les incidents.
Les plus marquants:
J'ai mon champion catégorie nombril XXL: un frontalier français qui bosse en Suisse. Gros soucis de rame, on prend un train de substitution jusqu'à une gare intermédiaire. 3 rames annulées pour une rame de substitution, ça ne peut pas passer, c'est la misère pour tout le monde, mode sardine, des gens qui ne peuvent pas rentrer, l'horreur, j'arrive à me faufiler en cabine arrière, j'ouvre la fenêtre, grave erreur, un mec me prend à partie depuis le quai. Je reste courtois, je lui explique, il n'en démord pas, ouin ouin, un scandale, incompétents, blabla de couineur pendant 5 minutes. Et là phrase magique: "nan mais vous vous rendez compte, la SNCF me vole mon temps de vie avec mes gosses, je vais pas les voir c'est inacceptable, c'est votre faute". On parle d'une rame HS, y'a un autre train dans une heure et il est 18 heures, le mec fait 1h20 de trajet matin et même chose le soir, c'est un choix perso d'habiter à 80 bornes de son lieu de travail pour palper en étant à la campagne. Et c'est ma faute.
Je lui re-explique l'incident technique en ajoutant qu'il n'est pas tout seul, qu'il regarde ses copains de galère sardines qui restent peinards malgré le bordel. En ajoutant que perso ça me casse aussi les burnes, je vais finir à 1h du matin au lieu de 23h avec l'enchaînement de la merde et que moi non plus je vais pas voir des gens ce soir.
"Ah mais vous c'est pas pareil, vous faites partie de l'entreprise, vous avez signé, c'est à voir avec votre employeur".
Je crois que j'ai soudainement rigolé nerveusement et bizarrement il s'est barré très vite.
Moi, moi, moi, moi, le reste osef. Et des comme ça, en moins débile, heureusement, t'en as à chaque incident.
J'ai eu un accident de personne, y'a une meuf qui m'a demandé au bout de 10 minutes, alors que je comptais les voyageurs, après lui avoir expliqué qu'on en avait pour 3 heures minimum avec la police les pompiers, médecins, pompes funèbres, etc... , si on ne pouvait pas repartir tout de suite, le gonz' était mort, c'est bon, ça passe. Grosse empathie, y'a un désespéré qui vient de se faire applatir, des morceaux un peu partout, zéro respect.
Y'en a un qui a commencé à venir m'insulter aussi un jour de grève alors que je conduisais, aka je faisais pas grève: putains de grévistes, enculés de privillégiés, etc... Je nettoyais ma répartie et mon sarcasme, mais là miracle, des voyageurs brillants (sans ironie) l'ont choppé et l'ont verbalement remis à sa place en lui expliquant pas trop gentiment que si il était arrivé c'était parce que j'étais là donc qu'il ferait bien mieux de la fermer assez rapidement. Des gens biens et intelligents il y en a, j'avais prévenu.
- les passages à niveau. Et alors là on tombe dans le délire total. Tous les jours des gens passent les barrières, que le train soit arrêté en gare, qu'il roule, qu'on ait de la visibilité ou non, qu'il pleuve, vente, neige, osef, y'a une barrière, des feux clignotants, une sonnerie, balec, FAUT TRAVERSER.
Et c'est pas un de temps en temps, c'est entre 10 et 20 par jour. Rien que pour mes trains, je vous laisse faire le calcul sur la totalité des trajets. Quasi rien en voiture car les barrières dissuadent bien et gênent, mais alors à pieds, à vélo ou en scooter, c'est la fête de l'abruti. J'ai failli en choper je ne sais combien. Tout ça pour gagner 30 secondes.
Bref, tu vois le florilège et la fréquence de toutes ces incivilités, même en étant mignon et plein de bonnes intentions (et j'ai pas parlé du Saint Signal d'Alarme, ça fait trop d'un coup ), au bout d'un moment le bétail te paraît plus civilisé. D'ailleurs ça fait plusieurs années que j'insulte les troupeaux en qualifiant ainsi nos chers voyageurs. Cependant, quand on venait me demander quelque chose, j'ai toujours répondu cordialement, si ça se trouve la personne en face fait partie de l'élite, fallait laisser sa chance au produit.
Soyez donc pas étonnés si on vous répond moyennement bien sur un quai: vous êtes le 341e à venir poser la même question et y'en a 175 qui ont cassé les couilles ou mal parlé, donc ouais, il arrive que ça pète. Mettez vous à la place de l'humain en face de vous: des fois c'est compliqué.
Alerte nouveau pavé.
TL;DR: pas mal de gens sont toujours des cons, mais en plus détaillé. 
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