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Parmi les grandes mythologies répétées à n'en plus finir sur la quasi-totalité de notre espace médiatique, "l'assistanat français" fait partie des thèmes récurrents auxquels s'abreuvent principalement l'UMP et le FN.
Qu'en est-il vraiment ? C'est ce que je vous propose de découvrir avec ce texte de Jean Gadrey, économiste.
Quelques gros mensonges sur l’assistanat et sur les chômeurs
1. La France dépense plus en aides sociales que les autres pays d’Europe ? C’est faux.
Citation :
Ainsi, pour les dépenses en minima sociaux, “Nous sommes dans la moyenne européenne des 27 pays”, selon Henri Sterdyniak, économiste à l’OFCE. Les pays scandinaves dépensent bien plus que nous. Plus étonnant : l’Angleterre et l’Irlande aussi.
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2. Les montants des minima sociaux sont plus importants en France ? C’est faux.
Les montants des aides sociales françaises sont très bas dans l’ensemble des 12 pays européens les plus riches. Citation :
Selon une étude de l’Institut de recherches économiques et sociales de 2007, «les montants des revenus minima sont beaucoup plus élevés» dans les onze autres pays européens étudiés: « de 30 à 40 % au Royaume-Uni et en Finlande, de l’ordre de 50 à 75 % en Irlande, Suède, Belgique et Pays-Bas, environ le double en Norvège et en Islande, et de l’ordre de 150% au Danemark ».
Au cours des années récentes, le niveau des minima sociaux a baissé par rapport aux salaires et à la richesse nationale : « la situation relative des allocataires des minima sociaux s’est progressivement dégradée en termes de pouvoir d’achat par rapport au SMIC » (ONPES). Le décrochage est énorme : une perte de 25 à 30 % de pouvoir d’achat par rapport au SMIC horaire depuis 1989 !
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3. On peut gagner davantage en touchant les minima sociaux qu’en travaillant au SMIC ? Faux.
Citation :
Selon Laurent Wauquiez, “aujourd’hui, un couple qui est au RSA, en cumulant les différents systèmes de minima sociaux, peut gagner plus qu’un couple dans lequel il y a une personne qui travaille au smic. Ça c’est la société française qui tourne à l’envers.” Or tous les calculs montrent que c’est faux (et de loin) si l’on prend le SMIC à temps plein.
Évidemment le SMIC à mi-temps étant à peine supérieur au RSA socle, ceux qui sont en dessous du mi-temps (40 %, 25 %, parfois moins) ont un salaire inférieur au RSA. Mais même dans ce cas, le RSA activité, en dépit de ses effets pervers d’incitation à créer des petits boulots, interdit qu’on puisse gagner plus en ne travaillant pas. Quelle que soit la composition de la famille.
Il est vrai qu’on peut trouver de rares cas, parfaitement scandaleux, où un chômeur au RSA trouvant à travailler quelques heures (déclarées) par semaine se voit supprimer son allocation logement et gagne alors moins qu’avant, mais ce n’est pas alors « l’assistanat » qui est en cause, c’est la brutalité et l’injustice de telles mesures.
Enfin, la proportion de contrats à temps partiel « contraints » s’accroît et celle des travailleurs ayant un revenu inférieur au seuil de pauvreté augmente, en lien avec l’accroissement des contrats de travail précaires : il y a près de 2 millions de travailleurs pauvres (ONPES).
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4. Les personnes aidées ont en plus des petits avantages que n’ont pas les smicards ? Largement faux
Citation :
les “droits connexes” (transports en commun gratuits ou à tarif réduit, cantine moins chère pour les enfants, services de garde, tarifs sociaux de l’électricité) sont ciblés et s’adressent à des populations limitées, le plus souvent en fonction de leurs revenus, et globalement ils ne pèsent pas lourd. Ils sont parfaitement justifiés et même très insuffisants.
Ces arguments anti-pauvres sont d’autant plus scandaleux que l’augmentation des dépenses contraintes des ménages les plus pauvres les appauvrit de plus en plus. Selon le Secours catholique (Message, février 2011) : « se chauffer devient un luxe pour des millions de personnes », 3,4 millions de personnes subissent la précarité énergétique, les demandes d’aide au chauffage ont augmenté de 50 % entre 2008 et 2009 au Secours Catholique. Le prix du gaz a augmenté de 48 % depuis 2004.
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5. Les étrangers peuvent profiter facilement de ces minima sociaux. Faux aussi
Citation :
Laurent Wauquiez a proposé de réserver le RSA aux étrangers travaillant depuis cinq ans minimum en France. Il ignorait visiblement que la loi instaurant le revenu de solidarité active prévoit déjà exactement la même chose : il faut être en possession d’un titre de séjour et d’une carte de travail depuis au moins cinq ans pour bénéficier du RSA si on est natif d’un pays extérieur à l’Union européenne.
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SUR L’OBLIGATION DE FAIRE TRAVAILLER LES PAUVRES GRATIS EN CONTREPARTIE DU RSA
Citation :
Autre proposition du ministre ; instaurer “chaque semaine cinq heures de service social” (ou travaux d’intérêt général) obligatoire en contrepartie du RSA. Outre le fait que 446 000 bénéficiaires du RSA travaillent, les travaux proposés par le ministre, qu’il s’agisse de “l’accueil de service public” ou de la surveillance des sorties d’école, sont déjà des postes en contrats aidés, justement proposés à des publics en réinsertion. Remplacer ces personnes – généralement rémunérées sur des contrats d’une vingtaine d’heures – par des allocataires du RSA risquerait de précipiter ces publics vers la désinsertion.
C’est une bien curieuse déviation qui fait qu’aujourd’hui on ne parle de travaux d’intérêt général que pour désigner des tâches peu qualifiées réservées aux exclus du système. Je crois pour ma part que l’objectif d’une bonne société devrait être que tous les travaux et tous les emplois concourent à l’intérêt général, et que tous soient dignes. On s’apercevrait alors que le travail des traders n’est pas d’intérêt général mais juste au service d’une petite couche de spéculateurs qui jouent contre l’intérêt général. Or, ce sont ces gens-là, traders et spéculateurs ou rentiers, que notre système rémunère le plus. Et si, comme je le crois, l’accueil du public ou les sorties d’école relèvent de l’intérêt général, alors il faut des emplois décents et pérennes pour les assurer.
Je reviens sur cette idée qui fait des dégâts : « les allocations et minima encouragent à ne rien faire » (http://www.mediapart.fr/journal/economie/090511/la-france-un-pays-dassistes)
C’est ce que pensent environ la moitié des Français, parce qu’ils sont soumis à une propagande effroyable. Or, c’est un mensonge de classe qu’il faut combattre (le mensonge, et la classe des ploutocrates qui répand ces idées).
Selon une enquête menée en 2009 par le Trésor auprès de 7.000 allocataires du RMI (RSA), de l’allocation parent isolé et des ASS, seuls 4 % des sondés donnent comme raison de leur inactivité la non rentabilité financière de la reprise d’activité. C’est même seulement 1% selon la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF).
Les études convergent : même dans les cas où le gain à la reprise d’un emploi est faible, les bénéficiaires de minima sociaux veulent en général tout de même en retrouver un, et il n’est pas rare qu’ils reprennent un travail même s’ils y perdent. La motivation financière n’est donc pas primordiale.
Selon l’enquête du Trésor, si un quart des bénéficiaires du RMI/RSA ne recherchent pas activement d’emploi, c’est d’abord à cause de leur état de santé, de contraintes personnelles, comme le sentiment de ne pas être employable en raison d’une période d’inactivité trop longue, l’absence de moyen de transport ou la garde des enfants… ET SURTOUT LE FAIT QU’IL N’Y A PAS D’EMPLOI DISPONIBLE ou que ceux que l’on propose sont souvent des « offres déraisonnables ».
Les chômeurs n’ont besoin ni de carotte ni de bâton mais d’abord d’emplois décents, de formation et d’accompagnement digne de ce nom.
L’assistance ne peut être assimilée à l’assistanat. L’assistance est avant tout un devoir de solidarité de l’ensemble de ses membres envers les plus fragiles d’entre eux (ONPES). La non assistance à personne en danger est un délit.
ONPES : « Selon les études dont nous disposons, on observe plutôt que de plus en plus de personnes cherchent à travailler pour échapper à la pauvreté ».
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QUI SONT LES VRAIS PROFITEURS DU SYSTEME ?
Citation :
Oui, il y a en France et ailleurs des gens qui gagnent beaucoup sans travailler, mais ceux-là on ne les traite pas d’assistés. Ce sont les rentiers, spéculateurs et tous ceux qui font travailler leur argent parce qu’ils en ont déjà beaucoup, ceux aussi qui profitent de niches fiscales taillées sur mesure pour les très riches ou encore des paradis fiscaux. Là, cela ne se compte pas en milliards d’euros mais en dizaines. Et cela fait des dégâts sociaux car ce sont eux qui sont à l’origine de la crise financière et économique, qui sont à l’origine des millions de personnes chassées de leur logement aux Etats-Unis et de la forte montée du chômage depuis 2008. Non seulement ils profitent du système de l’enrichissement facile, mais ils plongent les plus modestes dans la misère, et ensuite ils les accusent d’être des assistés.
L’inactivité des rentiers leur a rapporté une centaine de milliards d’euros en 2010, rien qu’en dividendes versés et autres revenus de la propriété et des stock options.
Il est temps de dénoncer l’indécente richesse des très riches. Pendant que le pouvoir d’achat des minima sociaux stagnait ou régressait et que les dépenses contraintes bondissaient, eux s’en sont mis plein les poches et ils continuent. Entre 2004 et 2007, derniers chiffres de l’Insee, la croissance des revenus la plus vive (+ 40 % en trois ans) se situe dans la petite tranche des 0,01 % les plus riches, le dix millièmes du haut de l’échelle. Et pour eux la crise a été de courte durée et elle s’est terminée dès 2009. Pour les autres, elle se poursuit.
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http://alternatives-economiques.fr [...] -chomeurs/
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