H1 : Les hommes préfèrent les blondes.    
H3 : Pas moi !    
H2 : Enfin, pas les Irlandais.    
H3 : Les vieux Irlandais !    
H1 : OUAIS, même là-bas la tradition de la Guinness se perd.  
H2 : Qu’est-ce que t’en sais, tu l’as lu sur Wikipedia ?  
H1 : J’y étais, l’été dernier ! Ils boivent de la Bud. Quelle misère !  
C’est la mondialisation, ça ! La concurrence libre et non faussée, sur fond de marketing aux petits oignons. L’uniformité !  
H2 : Bah, même le vin rouge ici régresse. Ils préfèrent la vodka raide bulle, les jeunes.  
Ça va leur attaquer le cerveau.  
H1 : T’y vas pas avec le dos de la cuillère, ils boivent tous ça dans les salles des marchés.  
C’est la copine de Marie qui me l’a dit, celle de la semaine dernière, avec  des espadrilles à paillettes et des seins tout neufs, énormes.  
Son mec bosse à la Société générale.  
H3 : Bonne pioche !    
H2 : Jolis euh  … zyeux bien sûr ! Inoubliables !    
H1 : Non il a participé au dépouillement des fichiers, justement, pour savoir  comment c’est arrivé.    
H3 : Et il a trouvé ? Ils partent bientôt  autour du monde ? Mouarfffffff !  
   
   
   
J’étais là.    
J’entendais déblatérer ces types en chemisette au bar.    
Ils auraient pu se plaindre des radars automatiques ou du classement du PSG  après 4 journées de championnat.  
Quelque part au moins, il y avait une once d’exotisme et de…  De  quoi ?    
J’attendais que Phebs entre.  
Impatiemment.    
Je servais à boire à ces types.  
Mes habitués.    
   
C’est dans ce pub, 2, place Curie, pas loin du tout de l’hosto, qu’il m’a serré dans ses bras la première fois. En toute amitié. Et on est passé à côté, moins amicalement !    
   
Et puis il revenait souvent, du temps où il était très épris. Enfin lui.  
Bon, il était plutôt beau, petit, un peu gros, pas trop, avec de magnifiques yeux vert amande. Et fan de voile, en plus.  
Certains sont en pamoison devant les motards et leur gros calibres Moi, j’aime les types avec une résidence secondaire flottante conséquente.  
Je suis affreusement matérialiste, à tout point de vue, on n’a qu’une vie, ici, Stirner est mon maître à penser.  
"Regardez Stirner, regardez-le, le paisible ennemi de toute contrainte.  
Pour le moment, il boit encore de la bière, bientôt il boira du sang comme si c'était de l'eau.  "
Et, dans ce domaine flottant, la taille est essentielle. Plus c’est grand, plus le compte off-shore assorti est bien garni.  
Rhô marins de tous pays, gardez-moi une place au fond de vos lits !  
On était de sacrés polissons, cherchant toute la journée le moyen de nous croiser pour nous envoyer en l’air deux minutes ou  deux heures ou ... enfin  autant que sa femme laissait faire. Incognito, bien sûr. Mon p’tit Phybie, il avait honte.  
   
Et puis moins souvent.  
Il fallait agir !  
Il trouvait d’autres plaisirs, sans moi. Inacceptable !  
Pas question de laisser s’échapper mon gros poisson plein d’fric.    
Alors je me suis surpassé.  
J’ai commencé à commander cette grosse baleine. Doucement.  
Jusqu’au jour où je me suis décidé à l’ligoter à son pieu.  
Coup de poker, il m’avait bien dit qu’il haïssait toute contrainte. Mais je le soupçonnais d’avoir juste la crainte de se laisser aller.    
Et de fait, il a adoré,  
Le pauvre.  
J’avais enfin cette prise sur lui qui me permettrait de finir mes jours à naviguer !    
Le voir beaucoup...  
M’amuser de lui...  
Je l’ai drogué au sexe, petit à petit,  
Et, forcément, sa femme en a eu assez de ne pas le voir rentrer. Il aurait eu bien du mal, toutes ces nuits qu’il a passées accroché à mon radiateur en fonte.  
Un divorce plus tard, j’étais l’heureux potentiel héritier de son magnifique Lagoon 500 flambant neuf.    
   
H1 : une autre pinte de Guinness et deux de Despé, steuplaît.  
   
Les expériences se succédaient et je n’y allais pas avec le dos de la cuillère ! J’ai par exemple beaucoup aimé le laisser penser qu’il allait avaler des couleuvres, deux simples anguilles en réalité, mais il avait les yeux bandés et une mauvaise connaissance de l’anatomie des invertébrés.    
Je les ai laissées s’enrouler autour de ses membres, avant de les décapiter sur son dos, de les dépecer, les faire griller et les faire avaler à mon petit Phebs tremblant. Et surpris que ce soit goûtu.  
   
Il est entré comme je l’avais exigé, est allé voir le groupe au bar. S’est approché du barbu, comme prévu.    
Mais son interlocuteur, lui, je savais qu’il ne goûterait pas la plaisanterie ; j’avais tenté de tester les fesses rebondies du garçon et j’avais laissé ma rate dans la bagarre, il était passé en comparution immédiate, je ne m’étais pas porté partie civile, je m’étais même excusé, il avait continué à venir voir les matchs ici.  Et j'avais arrêté les grands baraqués.  
   
– « En Phybie, on est bien, hein ?  », qu’il a dit !  
Il était sans doute sincère. Et en tout cas obéissant. Il a dit la phrase, tout timidement, au grand barbu qui me faisait face, en mettant bien sa main toute douce d’informaticien au paquet de cet ancien pilard de l’équipe de Castres.  
Et, instantanément, le mec lui a balancé en pleine tête son énorme poing poilu.  
Mon très cher Phebs a décollé pour atterrir contre la machine automatique à laver les verres. Scratch dling dling dlllang ddling dling.  
Maintenant je connais le bruit d’une explosion conjointe de boîte crânienne et d’une lave-verres.  
Elle va marcher beaucoup moins bien, forcément.