Un autre article bien écrit sur le cas TF1 :
Poivre dixit (TV Bouygues, 16/05/02), « Puisque l'actualité nous permet de souffler » soulagement de Poivre, soufflons un peu. C'est dur de dire la messe. Mais Poivre possède bien son évangile; le sport, en ces périodes troublées, reste un excellent dérivatif. Goebbels l'avait compris et Hitler approuvé, avec les J.O. de 1938, histoire de présenter l'image d'une Allemagne forte, saine et heureuse, sous les bannières à croix gammée. T.F.1, chaîne de télévision démocratique a des ambitions plus modestes : exalter la France en bleu, celle des bleus et des brigades anti-criminalité. Et surtout vendre l'image de Chirac, une image positive. Mission difficile. Mais, Poivre aime bien ce donneur de leçons morales et civiques, version 2002; Chirac rassure selon Poivre, ce journaliste soucieux de déférence ne saurait que stigmatiser ceux qui le considèrent comme un escroc.
Le président est intouchable, et d'ailleurs, la cérémonie d'investiture à l'Élysée a été « sobre ». c'est rassurant. Poivre aime rassurer. Comme Sarkozy qui, dans le même J.T., s'épanche sur la nécessité de défendre l'État de Droit c'est à dire, traduit du sarkozien : le droit des riches à cogner les pauvres. Là-dessus, Poivre n'a rien à redire. Dans l'évangile selon saint-Poivre, la défense de l'ordre autorise bien quelques excès mineurs, l'utilisation des flash-balls, par exemple, histoire de marquer d'hématomes bien visible la chair des gibiers de potences les jeunes des cités. Grand professionnel, Poivre précise qu'il s'agit de « balles non-perforantes », innovation de produit insuffisante, certes. Pour les balles perforantes, il faudra attendre encore un peu, malheureusement. Ce qui risque de mécontenter le ramassis des fidèles de Pernaut et leurs certitudes en béton : trop de violence, d'insécurité, pas assez de répression ! derrière le discours policé de Poivre, T.F.1 suinte la Haine ! Une haine froide et calculée, car il s'agit de récolter les dividendes de la peur !
TV Bouygues, via Poivre, Pernaut et autre Chazal, rentabilise à fond son fonds de commerce. Avec, comme guest stars, l'insécurité, l'angoisse des boutiquiers et des vieux, la haine et la nostalgie d'une France purifiée. À quand l'homogénéité ethnique ? Bref, des J.T. très ordinaires pour une France qui pue. Et dort, recluse de confort et de sécurité, sans lesquels il n'est bien sûr pas de liberté. Dans la somnolence générale, T.F.1 distille ses poisons. Auxquels font écho les propos de Sarkozy, maire de Neuilly et ami des riches : « Nous chercherons les délinquants là où ils se trouvent. » (France Info, 16/05/02). Tiens donc ! Même à l'Élysée ? ce qui serait normal pour un partisan de l'impunité zéro. Tout cela vire à la farce macabre.
Poivre aime le peuple, celui des esclaves de la caverne, parce que ce peuple aime bien T.F.1; où l'information, impartiale on s'en doute, circule en boucle. À ce titre Poivre, ex-jeune giscardien, s'interroge gravement à propos des attaques dirigées contre la maison Bouygues, à laquelle on souhaite le destin de la maison Usher (Le Monde, 16/05/02) : « Et pourquoi soudainement tant de haine ? ». Poivre s'indigne contre « l'épurateur » Julien Dray, ce socialiste sécuritaire. Poivre connaît à fond l'art de pontifier, d'énoncer des âneries sur un ton mielleux, qui signe ses performances de grand professionnel de la désinformation.
Poivre est la grand prêtre de la religion sécuritaire. Il n'aime pas ceux qui excusent les jeunes qui lynchent des « pères de famille ». ce sont des voyous, poursuit le révérend Poivre, dans son homélie. Ce même curé sécuritaire, lui et ses deux cent congénères de la maison Bouygues, se contentent « d'énumérer des faits ». Pour ces théologiens de la religion du sordide et de l'audimat, c'est le monde qui fait peur. Ils ne sont que les messagers de la peur. Donc, innocents. Grotesque. La peur, ce sont eux qui la construisent, en larguant de l'huile sur le feu. Que ce ramassis de crétins ne s'étonne pas des éclaboussures !
Le monde selon Poivre est un mélange confus, un chaos de bruit et de fureur où se mêlent, ce qui en dit long sur la rigueur du personnage, « les dramatiques conséquences du 11 septembre [
], les équipées sanglantes des commissariats de Vannes et de Béziers », sans parler, mises sur le même plan, « des tournantes [
], viols collectifs, [
] crimes pédophiles », et j'en passe.
Intéressant, le monde selon Poivre, où le bateleur estampillé Bouygues rafle la mise et fait voter F.N., jusque dans une France rurale terrorisée, où les immigrés sont absents.
Poivre est un onctueux vendeur de haine, onctueux et hypocrite, mais révulsé quand on accuse TV Bouygues, lui même et deux cent autres larbins de « fascisme ».
Pas fasciste du tout T.F.1 : juste putassière et sécuritaire, vulgaire et populacière, tendance France profonde. Nostalgique de tout ce qu'il y a de plus rance. En bref, quatorze millions d'idiots si attachés à leur servitude qu'ils vénèrent leur propre idiotie. À l'image de Poivre, ce spécialiste du non-événement et du mensonge distingué. Avant de prendre la plume, poivre devrait méditer cette phrase de Léon Bloy :
« l'avilissement volontaire de la parole est, sans contredit, un des attentats les plus bas que l'on puisse rêver. »
Ça le concerne. Car, pour avilir à la fois la parole et l'image, Poivre est un grand connaisseur. Dégage baltringue !