Préambule, l'objectif de ce thread n'est pas de parler de l'image médiatique de Seaz ni de sa discographie complète, mais juste de son dernier album, "Debbie". Alors un minimum de respect serait cool, ouvrez ou utilisez d'autres thread pour ces autres sujets.
C'est un album tout en relief et c'est un de ses aspects très sympathiques. Par contre les structures des chansons sont trop souvent des intro plus ou moins longues avec juste la voix et une musique minimaliste qui va ensuite évoluer selon la chanson, vers plus de densité, de dureté ou autres et selon différents schémas. En 2004, c'est une structuration un chouilla simple et trop répété sur l'album. Cela ne gène cependant pas vraiment son écoute et pas du tout son intérêt, c'est plus un regret. On peu noter avec amusement que Saez prend l'exact contre-pied de ce que demande les maisons de disques aux artistes pour mieux vendre leurs disques, entame accrocheuse, enjouée, dynamique ou autres, dans les 30 premières secondes. Il me semble bien reconnaître là une petite provocation gamine typique de Saez! :-)
Autre aspect, comme pour les précédents albums, bien que je ne les connaisse que très peu, Saez utilise beaucoup de voix différentes dans leur timbre ou façon de chanter, mais cela me semble moins diversifié dans cet album. Il y a aussi un choix vraiment différent des albums précédents, la dominante d'un chant au timbre tendant vers le grave et des successions mélodiques au lieu d'enchaînements à la pop comme c'est fait que quelques fois. Ce timbre de voix plus grave est plus facile que d'autres plus aigus lesquels demandent une certaine acoutumance avant de plaire. Par contre, bien plus que sur les précédents albums, il y a des erreurs de prononciations assez fréquentes et certaines ne peuvent que frapper comme de nombreuses utilisations de "è" à la place de "é" pour des rimes cocasses ou une persistance du grave (le "é" poussant plus vers l'aiguë que ne le fait un "é" ). Il y a aussi des "iiiii" tendant vers des "éééé" et il semble pour des raisons similaires. Tout cela sent la provoc gamine vis à vis de reproches qu'on a pu lui faire précédemment. Je m'en serait passé mais cela reste un détail tout à fait surmontable et bénin.
Les textes, il ne faudra pas y chercher de grand textes. Du moins c'est ce qu'il me semble car j'avoue ne pas prêter attention à cet aspect, par contre rien ne m'a frappé. J'ai noté beaucoup d'emportements très adolescents et de grandes causes trop connues et évidentes, bon faut que jeunesse se passe et même si Saez me semble avoir une adolescence tardive je trouve tout cela plutôt amusant et sympathique. Boarf, parfois, il n'est pas inutile de rabâcher des évidences si facilement oubliées et mises de côté, mais cela pourra agacer un peu. Pour moi cela n'a pas été un problème, les textes incompréhensible, les autres sempiternels sujets comme les amourettes, ou même des textes sympa mais rien de boulversifiant, tout cela m'est d'un intérêt tout aussi superficiel, la chanson à texte c'est pas mon truc.
Ces réserves précisées, reste un album vraiment rock et malgré le chant en français, la chanson française n'effleure jamais l'esprit à l'écoute de l'album. C'est un album très diversifié, beaucoup d'énergie, parfois de la violence, d'autres fois nostalgique, parfois doux, ou encore hésitant et quelques fois touchant. C'est surtout un album très intéressant et avec de nombreux efforts et réussites de composition. Suit un titre à titre pour détailler tout cela sans rester dans le superficiel. Un avertissement, à rentrer dans les détails comme j'en fait l'effort dans ce qui suit, je ne suis pas un professionnel et il y a sûrement quelques erreurs. J'ai au moins essayé de vérifier un peu mes références sans trop me baser sur des souvenirs, et dans mes explications de rester très prudent mais ce n'est pas toujours possible pour essayer d'expliquer un peu la musique.
- "Debbie" : Comme sur beaucoup de chansons de cet album, le début du titre est très minimaliste, rythmique juste avec une cymbale, une guitare qui dégouline en arrière plan et la voix. Puis assez vite ca éclate mais pour revenir à un titre maitrisé mais avec une orchestration plus fournie, la batterie sèche doublée d'une cymbale est mise en avant donne une couleur. Et cela évolue tout au long du morçeau, voix tendance épique modéré, riffs solitaires qui éclatent, cuivre ici ou harmonica, varrié et excellent.
- "En travers les néons" : Rien que le titre évoque "Noir Désir" et c'est bien l'homage direct et flagrant à ce groupe. Il ne faut pas vouloir trouver du Bernard Cantat dans la voix, par contre dans la manière de chanter il y a un emprunt évident sur une partie du titre, c'est le seul titre de cet album qui a cette approche. Mais cela ne s'arête pas au chant, la musique complexe, pleine d'énergie, de guitares, de quelques riffs espacés mais triomphants, mur brouillon mais qui nétouffe pas une rythmique rapide, tout cela est comme ce qu'a fait de plus typique Noir Désir. Je n'ai pas remarqué de copiage direct mais je ne connait pas tous les albums de Noir Désir, en tout cas j'ai trouvé ce titre très intéressant, excellent. D'habitude, cette influence trop marquante que l'on retrouve chez trop de groupe rock français et ici un vrai hommage réussi et sur une seule chanson de l'album, pas d'abus.
- "Céleste" : Bon le texte de cette chanson est peut-être pas mal, à vous de voir. Sur la première moitié, la voix est fragile pleine d'humain, légèrement hésitante et éraillée, la musique et minimaliste et tout en douceur, il y a une vrai atmosphère. Ensuite la musique est plus dense, la voix devient très varriée dont des jeux en échos de deux voix très opposées. Lent, beau, superbe et recherché.
- Marie ou Marylin : Après l'intro minimaliste avec juste la voix et une musique minimaliste vaguement bordel, des guitares violentes surgissent, au son sec, agressif, pas si courant. Le chant martelé et à la texture agressive va parfaitement en accord. En fait cela va évoluer par pallier et dans des sonorités différentes, avec des passages aussi rapides mais au lieu d'être saccadé et agressifs, cela déboule, c'est plus rond aussi bien pour la musique que le chant. Il y a une évolution globale allant jusqu'à un quasi hardcore très violent mais maitrisé. Il ne faut pas avoir des petites oreilles fragile c'est certain, mais ce requis satisfait, c'est entrainant et excitant, et il faut le dire, c'est drole et ça c'est cool!
- "J'hallucine" : Cela commence avec un gribouilli de guitare dissonant pour de suite avoir une rythmique rebondie qui ressort mais reste discrète. Plein de sons très intéressants, des nappes diverses, la basse qui s'amuse de ci de là, ici un cuivre, là une batterie qui éclate, le chant que se ballade sur tout cela. Un peu spécial mais très intéressant, doux et captivant au point que j'en oublie de prêter attention au texte!
- "Autour de moi les fous" : Dans ce titre, une musique qui occupe l'espace sonore, et tour à tour, étouffe, laisse s'échaper ou fusionne avec le chant. Impossible de ne pas penser à "Loveless" de My Bloody Valentine et pourtant c'est aussi fondamentalement différent. D'abord c'est ici que sur une chanson, merci pour la diversité de l'album. Ensuite le mur sonore est très différent. C'est moins un mur monolithique comme la noisy pop a abusé jusqu'à l'écurement. Il y a des porosités et des variations plus audibles, différents riffs avec des couleurs peu fréquentes. Le chant se démarque aussi des auto-copiages de la noisy pop, chant sucré, éthéré, tout en étirement. Ici cela va du chant quelque peu parlé et sec à de courts passages avec un chant tendant vers l'épique, en passant par des variations comme un chant parlé plus grave et tendant parfois vers le rocailleux. Enfin, "Loveless" se concentre sur la limite entre le chant inaudible et la fusion alors qu'ici c'est plus une danse autours de cette limite. Techniquement c'est moins impressionant, mais c'est très différent, il le fallait, et c'est très intéressant.
- "Dans le bleu de l'absinthe" : Ce titre est un peu à part, plus lent et tout au long de la chanson. Le chant lent et par phrases espacées se fait plus séducteur dans sa sonorité et se ballade sur une musique tout en bordel à moitié apaisé, nappes de sons et guitares, petits bruits qui éclatent avec discrétion. Drole de titre même si ce n'est pas d'une inventivité transcendantale, c'est riche et très intéressant et ce morceau le plus long de l'album passe pourtant dans un souffle.
- "Comme une ombre" : Ce titre est un peu en miroir du précédent, lent mais plus rapide que "Dans le bleu de l'absinthe". Mais cette fois la puissance est mise en avant et une structure apparaît dans l'évolution du morceau. C'est fait parfois par le jeu de la basse qui est mis très en avant, d'autres fois c'est fait par des guitares avec des riffs mid-tempo un peu agressifs mais pas violents. Le chant suit cette couleur, puissance sans vrai violence sinon étouffée, avec une voix modérément abrupte, moyennement grave et mise en avant. Un très bon titre de plus avec encore une fois une bonne richesse musicale qui accroît le plaisir d'écoute.
- "Marta" : Cela commence juste avec un piano, des notes espacées et la voix grave, légèrement éraillées, quelques trébuchements (bien évidement volontaires sur un album), une émotion. Plus loin, la voix change, plus criée, aigue et en étirements, le piano fait la rythmique et des sons, bouts de guitares, bouts de choeurs et autres viennent tour à tour construire une ambiance étrange. Une belle réussite et peu conventionnelle même si c'est une approche générale connue, mais pas si fréquente.
- "Clandestin" : Après une longue intro tout en douceur, la trompette surgit sur des dégoulis de sons et guitares, puis cela évolue pour un mélange bien plus inédit de choeurs en avant et trompette dans un superbe duo et se baladant, écrasant de leur présence diverses ambiances sonores. Ensuite quand le chant réapparaît tendance épique modéré, la trompette est en fond mais parfaitement audible avec un peu d'attention et par instant remonte pour attirer l'attention. Le Waterboys première période surgit alors des souvenirs. La version de Saez n'est pas aussi poignante que certaines des chansons de leur modèle (probable ou possible) par contre il y a vraiment une émotion et l'aspect bien plus crade construit une vrai différence avec Waterboys. Beau titre touchant avec discrétion.
- "Tu y crois" : Là le jeu c'est une montée en puissance tout en lenteur au point, quand on prête attention à ce jeu, d'être tendu à attendre l'explosion quand on finalement on s'aperçoit que le decrescendo a commencé. Cette structure typique a été utilisé en abondance, dont dernièrement Dolly sur un titre plus expérimental et allant jusqu'a rendre vraiment imperceptible la montée en puissance qui n'est détecté que par surprise sur la longueur. L'approche de Saez est moins expérimentale et originale mais la chanson est quand même superbe. Le travail de la montée en puissance est moins fin sur cet aspect caché mais par contre bien plus sophistiqué sur la façon dont elle est mise en place. C'est bien par des variations d'orchestration et changement d'utilisation d'instruments que ce fait la progression (au lieu d'être dans le cas de Dolly principalement une montée de volume pour mieux préserver l'aspect imperceptible) du coup c'est riche et l'intérêt y gagne. Un excellent titre de plus.
- Sakura : Titre bonus/caché, c'est une deconstruction avec une voix féminine qui évolue lentemen du parlé brutal au chanté presque parlé, le tout sur une sorte de musique déstructuré tendance psychédélique, à la Pink Floyd version bordel, pas à la Happy Mondays. La voix étant japonaise, y a t'il des références musicales à la musique japonaise? Peut-être, je n'en sais rien. Je ne capte pas ce titre mais cela ne me gêne pas du tout sur un titre caché d'avoir une expérimentation qui m'est incompréhensible mais pas sans intérêt.
Pour conclure cette longue chroniques, je doit dire que j'ai encore assez peu écouté cet album et j'en suis toujour à découvrir des détails dans la musique, répérer ou retrouver des mélanges ou approches originales, des influences et contextes historiques. Seul le temps me permetra de savoir si c'est juste un excellent album très intéresant ou si c'est vraiment un album de mon coeur. En tout cas il y postule et c'est pas si fréquent.
Alors bien entendu des avis différents ou contraires sont permis :-) , mais quand même, écouter sérieusement et plus d'une fois cet album avant d'en parler, avec un petit effort d'ouvrir ses oreilles et si possible un peu son coeur, faire un effort de comprendre pourquoi on aime ou pas et l'expliquer, c'est un respect minimum quand on veut détruire une création. Attention sur p2p se ballade des faux qui n'ont strictement rien à voir avec l'album. Pour éventuellement discuter de ce point, merci d'ouvrir un autre thread, c'était juste à titre informatif, pour éviter quelques méprises ridicules.
Bien, cet effort fait, maintenant je serai curieux de voir des crétins me ballancer des superficiel "c'est nul" sans avoir écouté le disque avec attention et sans justifier quoique ce soit autrement que par des avis ne montrant que leur inculture pathétique. Je suis violent, méprisant? Non, juste aggacé par la crétinerie superficielle et l'injustice, quand on ne connait pas on se tait, c'est un minimum d'intelligence, je parle de connaitre l'album. Quand à l'image médiatique de Seaz, c'est pas le propos de ce thread, alors ce serait le minimum d'aller vomir vos psychoses sur ce sujet aileurs.
Alors bien entendu des avis différent ou contraire sont permis, mais quand même, écouter sérieusement et plus d'une fois cet album avant d'en parler, faire un effort de comprendre pourquoi on aime ou pas et l'expliquer, c'est un respect minimum quand on veut détruire une création.