l'Antichrist | Citation :
J'y ai beaucoup pensé à ce sujet ces derniers jours.
En plus, ça tombait pile avec une "étude" des cours de Deleuze sur Spinoza - et justement la question du bien et du mal. Deleuze analyse une correspondance (épistolaire) de Spinoza avec... heu, j'ai oublié le nom... avec un type, et ce type était le premier qui "affronte" directement Spinoza sur la question du mal. Ce type (selon l'Histoire, très malin mais insolent) part de la pomme d'Adam ! : en quoi y avait-il un mal à la prendre, cette pomme ?
Deleuze, via Spinoza, en fait une remarquable analyse pour aboutir à la distinction entre les conséquences connues ou pas d'un acte, et comment ces connaissances sont-elles acquises : expérience, raisonnement ou révélation.
Bref... et comme souvent je trouve, ces textes, cette intelligence et rigueur de l'analyse (celle de Deleuze comme celle de Spinoza) entre en résonance (et grande amplification !) avec l'analyse scientifique, pragmatique et "orientée objet" (!) d'une démarche analytique et expérimentale modernes du comportement (je parle des sciences cognitives notamment).
Je voulais en proposer un texte ici, mais c'est horriblement exigeant en temps et en rigueur... je le ferais, parce que c'est carrément passionnant.
Le fichier en question s'appelle " Philosophie - Spinoza - Deleuze 3 - L'esprit de paradoxe (02-12-80))" , heu... comment dire... bon... vous voyez...
Il fait partie de la très louable collection d'archives de France Culture. Le chercher dessus peut-être...
Ah oui, aussi : Sur www.automatesintelligents.com , il y a un article sur les recherches de René Girard, [b]mettant limitation à la base de lapprentissage et à la base de tout lappareil intentionnel dun individu, ce qui encore une fois, est à faire résonner avec les données et résultats sur les neurones miroirs dans le cerveau des primates. (Un même neurone ou assemblée de neurones sont activés, et quand jeffectue une action particulière, et quand je vois un congénère effectuer la même action !! ).[/b]
Le lien : http://www.automatesintelligents.c [...] irard.html Un autre article au pif : http://www.automatesintelligents.c [...] llet2.html Et toute la rubrique échange du site, très intéressante.
A plus.
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Comme d'habitude, votre intervention est intéressante, intelligente et cultivée. Et puisque vous vous référez beaucoup à Spinoza, je peux ajouter à la partie en gras quelques précisions sur la théorie de l'imitation (défendue par Girard), telle qu'elle se présente chez Spinoza (j'ai juste parcouru rapidement vos autres posts sur la question de départ et le manque de temps m'empêche de les commenter bien qu'ils le mériteraient... avec quelques corrections cela dit... n'avez vous pas tendance à réduire le conatus à une force aveugle, inconsciente ou impersonnelle, un conatus = x, ce qui serait commettre un contresens grossier et confondre (sans le savoir... peut-être) le conatus spinoziste avec le conatus hobbesien, ce qui expliquerait aussi le tord que vous avez de trop rapprocher l'anthropologie Spinoziste de celle des sciences cognitives ? Il y aurait énormément à dire...)
Chez Spinoza, les individus humains, le plus souvent, ne constituent quune multitude vivant dans le jeu aveugle de ses passions, dans un état perpétuel dinstabilité dû au hasard des rencontres. Mais nous avons besoin de ces rencontres, qui ne sont jamais totalement négatives, car nous ne pouvons exister que dans une interdépendance universelle à légard de la Vie. Il y a donc une genèse - imaginaire et passionnelle - du corps social, par laquelle une communication interindividuelle est toujours possible, mais dans lambivalence. Tout dabord parce que toute représentation dune affection, comme laffection elle-même, enveloppe à la fois la nature de notre corps et celle du corps affectant. Demblée, un élément commun se dégage (même dans les passions les plus négatives comme la haine). Dautre part, une expérience (passionnelle) commune peut exister, dans laquelle la même cause affecte tous les membres dun groupe de façon identique. Le Traité théologico-politique développe abondamment cette thématique, avec lanalyse de limaginaire religieux. Linterindividualité spinoziste constitue alors un "organe-obstacle" à la socialité, facteur de conflictualité, mais aussi de rapprochement. Plus profondément, ce qui est en jeu ici, cest la constitution métaphysique du collectif. En d'autres termes, la métaphysique de Spinoza, cest sa politique. La politique est la métaphysique de limagination, de la constitution par lhomme du réel, du monde. Au fil des passions singulières du livre III de l'Ethique, lâme passe à des degrés supérieurs de perfection, tout entiers traversés par la vie passionnelle, qui acquiert une fonction constitutive méta-individuelle. Les affects fondamentaux, tels lAmour et la Haine, lAmbition et lHumanité, quand ils se rapportent aux autres hommes, constituent de nouveaux affects, par le seul fait quils se rapportent aux autres, quautrui les met en mouvement. Le processus parcourt le plan de lantagonisme tout en dirigeant ses efforts vers le plan de la socialité. Dans cette physique de la multiplicité et de la fluctuation telle quelle apparaît dans le livre III de lEthique, je ne puis affirmer mon être que dans ma relation à lautre parce que ma propre puissance dagir naugmente ou ne diminue que dans cette interaction. Le point de départ de la constitution du collectif nest plus alors lindividu en tant que "subjectivité" séparée des autres mais cette dynamique que fait sans cesse circuler les affects de lun à lautre. Le caractère spécifique de laffect résulte de linteraction de la puissance propre du moi et de celle de lautre, cest une transformation de moi par lautre, où je ne peux saisir ni mon identité, ni celle de lautre, mais seulement la modification. Il existe donc un "noyau" toujours-déjà rationnel, communicatif, de la vie interindividuelle passionnelle. Cest ce même noyau qui permet ainsi, dans le livre IV de l'Ethique (à partir de la proposition 59) de "récupérer" les désirs passionnels dans leur intégralité pour en faire des désirs rationnels : "A toutes les actions auxquelles nous détermine un affect qui est une passion, nous pouvons être déterminé sans lui par la raison". Cette interindividualité originaire sur laquelle va se déployer la raison, cest lidentification à lautre comme mon semblable et plus précisément encore limitation des sentiments. Celle-ci est le fondement même de la socialité et de la politique pour Spinoza. Tout horizon de transcendance se trouve supprimé, et ne reste que lespace horizontal des potentiae traversé par la force constitutive de "la matérialité des passions humaines". Cet horizon surdétermine lhétérogénéité des singularités individuelles pour en faire un procès collectif de constitution, un conatus interindividuel.
"Nous nous efforçons de faire tout ce que nous imaginons que les hommes considèrent avec joie, et au contraire nous avons de laversion à faire ce que nous imaginons que les hommes ont en aversion" (cf. Ethique, III, 39). Rien de plus étranger à Hobbes que ce principe d "égo-altruisme", d "imitation affective" qui nous fait éprouver les sentiments que nous avons inspiré à autrui. Cette perspective se situe donc en-decà de lalternative entre égoïsme et altruisme : me réjouir moi-même de la joie que je donne à mes semblables, cest la même chose que maimer moi-même à travers lamour quils me témoignent. La pitié est le plus bas degré de ce sentiment ; bien quelle soit une affection passive se rapportant à la tristesse, elle permet néanmoins dinstituer un lien "présocial" minimal qui peut, ponctuellement et anarchiquement (selon le hasard des rencontres) correspondre à la raison, mais qui nest en aucun cas engendrée par elle. Elle est de plus éphémère et inconstante, car "celui que touche aisément laffect de pitié, et quémeuvent le malheur ou les larmes dautrui, souvent fait quelque chose dont ensuite il se repent, tant parce que nous ne faisons, par affect, rien que nous sachions avec certitude être bon, que parce que de fausses larmes nous trompent aisément" (cf. Ethique, III, scolie). En aucun cas, donc, un quelconque pouvoir politique ne saurait faire appel à la pitié comme lien social devant remplacer la justice sociale. Tout au plus est-elle un sentiment individuel sans lequel un homme naurait "pas lair de ressembler à lhomme". En revanche, lambition et lHumanité , "effort pour faire quelque chose (...) pour la seule cause de plaire aux hommes" (ibidem), participent bien plus directement à la constitution dun lien social. Elles sont des passions communes par lesquelles nous faisons effort pour que les hommes (surtout le vulgaire) soient affecté dune joie dont nous serions la cause. Mais lAmbition est par là-même ambiguë, "parce quil peut se faire que la Joie dont quelquun imagine affecter tous les autres soit purement imaginaire, et que chacun sefforce dimaginer de lui-même tout ce quil imagine laffecter de Joie, il peut donc aisément se faire que le glorieux soit orgueilleux, et imagine être agréable à tous alors quil est pénible à tous" (Ibidem).
Bref, cette analyse spinoziste, en prenant pour point de départ la nature d'un désir sans objet c'est-à-dire sans manque (il faudrait sans doute ici développer ce que l'on entend par "affectivité" comme sentiment de l'existence, c'est-à-dire comme subjectivité ou Soi qui n'est rien en dehors de l'épreuve affective de soi dans le souffrir et le jouir), permet de donner un sens au "mal" comme transgression (c'est le désir qui impose sa loi à la loi elle-même et à l'interdit, ce qui signifie que ce qui est recherché dans la transgression, c'est la transgression et non l'objet du désir lui-même). Pour comprendre le processsus de la transgression, il ne sera pas inutile ici de reprendre l'analyse du désir dans son opposition au besoin !
Il est clair, en effet, que rattacher le désir à la volonté délibérée (raisonnable), cest finalement sans sen rendre compte assimiler le désir-manque au besoin : jéprouve le désir de boire, jexpérimente douloureusement labsence deau, parce que jen ai besoin pour vivre. En revanche, lanorexique a besoin de manger mais ne le désire pas (et de fait se fait vomir) : son désir nest pas déterminé par le manque objectif de la nourriture. Et cest pourquoi la volonté raisonnable tend à prendre le pas sur le pur désir car elle sexerce toujours par rapport à ce qui est le Bien pour nous, par rapport à la représentation dune valeur objective (appartenant à la chose) et nécessaire du point de vue de ma nature (biologique ou sociale). En ce sens, la logique du désir-manque (autre nom du besoin que la volonté raisonnable vient épauler et guider) est celle de lavoir et non de lêtre.
Or, la logique de lavoir ne convient pas au désir humain. Le désir est fondamentalement un manque dêtre. Quel est lopposé de lêtre ? Lopposé de lêtre qui manque, ce nest pas le "gros plein dêtre" mais lêtre en excès. Eros est la procréation cest-à-dire une manière de se jeter au dehors. Il faut rejeter le désir comme manque au nom de la puissance, de la procréation, de lexcès, du débordement (libido, chez Freud). Ainsi, le désir de connaissance nest pas le fait davoir une vérité mais de créer le savoir. De même, le désir amoureux nest pas seulement posséder lautre (lamour comme désir dunion charnelle a une dimension narcissique) mais aussi sauvegarder dans ce corps son identité, sa conscience, sa liberté (respecter lautre en tant quautre). Lamour nest pas la convoitise. Il ne sagit pas de se désoler de la possession impossible de lautre mais de se réjouir de sa seule existence (amour productif, joyeux).
Bref, mon désir ne porte pas sur ce qui a objectivement de la valeur. Je désire cette femme mais personne ne me dit que cette femme est belle parce que je la désire. Freud, par exemple, fait voir que mon attirance se justifie moins par un manque objectif que par la constitution de ma subjectivité psychique (souvenirs denfance). Le désir, cest ce quil appelle la pulsion et son objet est indifférent. Le désir nest pas réductible à un simple rapport (manque) à lobjet dont la valeur serait intrinsèque, ce qui justifierait lintervention dune autorité raisonnable (la volonté éclairée par la raison) chargée de déterminer le choix. On ne regarde pas de la même façon une photo suivant son origine sociale. Les déterminations du désir créent la valeur des choses. Le désir veut ce quil est et non ce dont il manque, la valeur se révélant toujours seconde par rapport à la puissance originaire du désir.
Et cest pourquoi le désir est aussi et peut-être surtout désir de linterdit (non le contraire mais le contradictoire de la volonté raisonnable). Désirer lobjet interdit, cest désirer le "mal". Mais quest-ce que le mal ou le bien ? Dabord des interdits justement ! Interdits sociaux et moraux (qui relèvent autant des moeurs que de la morale) transmis de génération en génération et qui fondent une civilisation. Des interdits entourés de sacré. Interdits qui, selon G. Bataille, canalisent la violence que porte en lui-même le couple formé par la sexualité et par la mort. Mais ces interdits signifient en même temps la violence quils inhibent. Linterdit, nécessaire pour la vie en communauté, indique ce quil veut cacher, valorise ce quil condamne. Lambiguïté de tout interdit moral est fondamentale. Linterdit autour du cadavre, par exemple, signifie à la fois notre attachement à la vie et la fascination pour la mort. Les interdits sexuels signifient à la fois notre répulsion et notre fascination pour ce quils interdisent (donc notre désir de...). Fascination-répulsion que nous retrouvons autour du sacré. Ainsi ce nest pas tant dieu qui fonde la morale, que nos interdits moraux qui sont à lorigine de notre fascination - comme de notre répulsion - pour Dieu, ou de ce qui revient au même, de notre répulsion - ou de notre fascination - pour le Diable.
Mieux linterdit appelle nécessairement sa transgression. Lexpérience de lérotisme, selon Bataille, est lexpérience même de la transgression dun interdit. "Lexpérience intérieure de lérotisme demande de celui qui la fonde une sensibilité non moins grande à langoisse fondant linterdit, quau désir menant à lenfreindre. Cest la sensibilité religieuse qui lie toujours étroitement le désir et leffroi, le plaisir intense et langoisse" dit Bataille. Les transgressions des interdits peuvent même être organisées rituellement dans de nombreuses sociétés, lors de fêtes ou de carnavals aux débordements sans limite. La guerre est peut-être une de ces transgressions des interdits valables en temps de paix, rituellement et régulièrement organisées par les sociétés humaines.
Et c'est encore Spinoza qui nous permet de comprendre ce passage par les rites pour fonder le "bien" et le "mal".
Tout lart du pouvoir politique est en effet de convaincre le citoyen quil vit selon ses propres désirs en le faisant agir sous des règles communes: "(...) on doit gouverner les hommes de sorte quils ne croient pas être menés, mais vivre à leur gré, selon leur libre décret, et quon les tienne ainsi par le seul amour de la liberté, par le désir de la possession et par lespoir daccéder aux charges publiques" (cf. Traité politique, X, 8). Le meilleur moyen pour cela, cest lintériorisation dun certain nombre de normes sociales, de leur objectivation. Il sagit alors pour Spinoza de politiser, dans un sens non destructeur pour lindividu et la communauté linstrument privilégié de cette institution imaginaire de la société, à savoir la religion.
Selon Spinoza, les constructions théologico-politiques apparaissent en effet à des moments particuliers de lhistoire et pour un peuple demeuré à un état dactualisation impuissante du conatus (et la religion, de part le défaut de lumière naturelle de la plus grande partie des hommes, apparaît alors comme une très grande consolation). Ces constructions intériorisent, par la menace et la crainte, un univers de signification fondé sur lignorance qui acquiert une vérité objectivement valide par un certain nombre de sédimentations collectives. Les significations religieuses doivent être imprimées de façon puissante et inoubliable (Moïse "les détourna par de terrifiantes menaces de la transgression de ces commandements" ) dans la conscience de lindividu. Comme les êtres humains sont fréquemment paresseux et négligents, il est nécessaire que des procédures réimpriment et rappellent ces significations, et si le besoin sen fait sentir, par des moyens coercitifs et généralement déplaisants. Telle est la fonction de la loi mosaïque. Mais celle-ci nest nullement un universel religieux, elle se trouve dépouillée de toute signification transcendante et spirituelle, au profit dune institution symbolique et imaginaire séculaire, ayant pour fonction première de sadapter à une configuration sociale particulière, à un état donné de la multitude. Ainsi, l "élection" des Hébreux ne revêt plus, pour Spinoza, quune signification purement temporelle : "la nation hébraïque a été élue par Dieu plus que les autres, en égard non à lentendement ni à la tranquillité dâme, mais au régime social et à la fortune qui lui donna un empire et le lui conserva tant dannées" (cf. Traité théologico-politique, III). En dautres termes, cette élection nest nullement métaphysique, elle na trait quaux avantages matériels consécutifs à la "félicité temporelle de leur État". Linstitution imaginaire de la société par la religion, si elle ne saurait remplacer un État fondé sur la raison est cependant, dans une certaine mesure, redoutablement efficace. Cest en effet par la force de conviction sur la multitude et son imaginaire, et non par la seule sanction temporelle que la religion hébraïque a manifesté sa puissance sur les esprits. Il ny a pas de juridiction plus efficace que celle, intérieure, de la conscience - surtout quand il nexiste pas de définition alternative de la réalité proposée par dautres institutions religieuses (on retrouve cette idée chez montaigne, Essais, Livre II, chap. V, "De la conscience" ). Un pouvoir fondé sur une coercition absolue, sur le monopole uniquement physique de la violence légitime où, par la menace, on réduit tous les citoyens au silence (comme lÉtat Turc du Traité politique ) ne saurait durer longtemps. Lexigence minimale pour tout pouvoir politique est de ne jamais être fondé sur la seule crainte. LÉtat théocratique a dû ainsi "instituer un pouvoir appartenant à la collectivité de façon que tous soient tenus dobéir à eux-mêmes et non à leurs semblables" (cf. Traité théologico-politique, V).
La principale vertu de Moïse fut donc de parvenir à donner cette illusion de démocratie, démocratie fondée certes sur un bien imaginaire et une aliénation idéologique, mais démocratie tout de même. "Il prit le plus grand soin de faire en sorte que le peuple remplît son office moins par crainte que de son plein gré (...). Pour cette raison Moïse (...) introduisit la religion dans lEtat, de façon que le peuple fit son office plus par dévotion que par crainte" (Ibidem). Lobjet du chapitre V du Traité théologico-politique est danalyser comment, par linstitution des cérémonies dans une telle société, lexistence des individus est intégralement ritualisée, tant au niveau des croyances que des pratiques, des esprits que des corps. Linstitutionnalisation et lextériorisation sont totales ; tous les problèmes sont communs, toutes les solutions à ces problèmes sont socialement objectivées et toutes les actions sociales sont institutionnalisées. Lordre social est constitué dune totalité qui rassemble lexécution continue dune liturgie complexe et hautement stylisée : le peuple "était tenu de se conformer à un certain rite déterminé pour labourer, semer, moissonner ; de même il ne pouvait prendre de nourriture, se vêtir, se soigner la tête et la barbe, se réjouir ni faire absolument quoi que ce fût, sinon en se conformant à des rites obligatoires et à des commandements prescrits par des lois" (Ibidem).
Dans cette ritualisation intégrale de lexistence, la réification de chaque individu dans des rôles socialement programmés rétrécit au maximum la distance subjective que celui-ci peut établir entre lui-même et son rôle. Cest une force de persuasion qui nagit nullement sur lintellect, mais sur lexpérience, donc limagination. La connaissance et la politique se trouvent encore une fois très étroitement imbriqués dans le processus. Dailleurs, dans le chapitre V du Traité théologico-politique Spinoza confond à dessein la "foule" (caractérisation politique) et le "vulgaire" (caractérisation épistémologique). Le procès de conditionnement psychologique et le procès de conditionnement politique sont les mêmes ; ils ne se fondent nullement sur "les seules notions de lintellect" mais "sadaptent" à la compréhension du "vulgaire", de la "foule" afin d"imprimer dans leurs âmes lobéissance et la dévotion". La politique théocratique utilise donc un corps de connaissances-type qui fournit des règles de conduite institutionnellement appropriées : "le vulgaire est tenu de connaître seulement les histoires qui peuvent le plus émouvoir les âmes et les disposer à lobéissance et à la dévotion".
Bourdieu, Foucault, etc... reprendront ces analyses à leur compte... Mais cela est une autre histoire, bientôt, peut-être... Message édité par l'Antichrist le 01-09-2005 à 21:16:30
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