Citation :
La chute hors du train [modifier]
Au cours d'un voyage en train à destination de Montbrison, le 23 mai 1920, vers 23 h 15, s'étant penché par la fenêtre de son compartiment alors qu'il éprouve une sensation d'étouffement, Paul Deschanel chute accidentellement du wagon. Heureusement, le convoi circule à ce moment-là à relativement faible allure (50 km/h) dans une zone de travaux à Mignerette (dans le Loiret, à une douzaine de kilomètres au nord-ouest de Montargis).
Tout ensanglanté - en dépit du caractère bénin de ses blessures -, relativement hébété et vêtu de son seul pyjama, Paul Deschanel ne tarde pas à rencontrer André Radeau, ouvrier cheminot qui surveille la zone de travaux, et auquel il se présente comme étant le président de la République. L'image des hommes publics étant à l'époque encore peu diffusée dans la population, le cheminot se montre sceptique – pensant à première vue avoir affaire à un ivrogne – mais conduit néanmoins le voyageur accidenté jusqu’à une maison de garde-barrière toute proche, où le blessé est soigné et mis au lit par ses sauveteurs. Le garde-barrière, Gustave Dariot, impressionné par la dignité du blessé et la cohérence de ses explications, part pendant ce temps prévenir la gendarmerie de Corbeilles. Pour la petite histoire, la femme du garde-barrière aurait dit à des journalistes : « J'avais bien vu que c'était un monsieur : il avait les pieds propres ! ».
La lenteur des communications entre les divers échelons fait que, malgré les faibles distances, le sous-préfet de Montargis, M. Lesueur, n'est prévenu par télégramme que vers 5 heures du matin. L'incident commence à avoir un retentissement certain lorsque l'on s'aperçoit, avant l'arrivée du train en gare de Roanne, vers 7 heures du matin, que le président de la République a disparu. La suite présidentielle (menée par Théodore Steeg (1868-1950), alors ministre de l'Intérieur) attendant sur le quai de la gare ne reste pas longtemps sans nouvelles. Une dépêche, envoyée par la gare de Montargis à celle de Saint-Germain-des-Fossés (Allier), dont le contenu explique succinctement le déroulement des évènements survenus dans la nuit, lui est rapidement transmise.
L'incident donne évidemment lieu dans la presse de l'époque à de nombreuses caricatures, souvent cruelles, et inspire la verve des chansonniers. Tout le monde ne se laisse toutefois pas aller à broder de manière démesurée voire mensongère sur un incident certes curieux (et qui frappe les esprits en raison de la notoriété de sa victime). Un « riverain » des lieux de l'accident obtiendra ainsi, plusieurs décennies plus tard, que soit apposée une stèle commémorative très sobre de l'incident, sans aucun élément de caricature, à proximité du passage à niveau et de l'ancienne maison de garde-barrière où avait été conduit Paul Deschanel après sa chute[2].
|