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DES FONCTIONNAIRES AUX PATRONS
Faux privilégiés, vrais nantis
Depuis les annonces faites, à deux jours d?intervalle, des candidatures de MM. Jacques Chirac et Lionel Jospin, l?ensemble des postulants à l?élection présidentielle française des 21 avril et 5 mai prochains sont connus. Pour l?instant, le scrutin ne suscite aucune passion. La désaffection des Français pourrait s?expliquer par le nombre de sujets d?accord entre les deux principaux camps, au point que ces derniers en viennent à s?accuser mutuellement de « plagiat ». Le consensus existait déjà en matière de politique étrangère ; les propositions économiques se ressemblent notamment depuis que les socialistes français ont pris l?initiative d?une baisse des impôts et d?un programme massif de privatisations ; la lutte contre l?insécurité est désormais formulée dans des termes presque identiques par les principaux candidats ; l?Europe ne suscite pas davantage de clivages. Cette convergence va-t-elle à présent s?observer en matière de « réforme » de l?Etat et de lutte contre les « privilèges » des fonctionnaires ? Ce serait oublier que les revenus les plus élevés restent ceux des chefs d?entreprise, qui ont progressé de 36 % en 2001. A un moment où la pauvreté, elle, ne marque aucun recul.
Par PIERRE BITOUN
Sociologue, chercheur à l?Institut national de la recherche agronomique (INRA), auteur, notamment, de Eloge des fonctionnaires. Pour en finir avec le grand matraquage (Calmann-Lévy, Paris, 2001). Ils sont des nantis. Ils ont la sécurité de l?emploi, sont mieux rémunérés que dans le privé, bénéficient d?une meilleure retraite, travaillent mollement, sont payés les jours de grève... Depuis vingt ans, des pages du mensuel Capital à celles du Nouvel Observateur, de l?émission de plateau à la « une » du Figaro, une campagne de conditionnement tente de faire croire que les fonctionnaires seraient des privilégiés. Publié en 1982, l?énorme best-seller de François de Closets Toujours plus ! avait déjà alimenté ce genre de thématique. A l?époque, révérence ou cécité, nul commentateur n?avait extrait de l?ouvrage cette phrase d?anthologie, mélange de stupidité et de cynisme : « Nous pouvons nous passer de journalistes, de médecins, de professeurs, de fonctionnaires, de cadres et d?ingénieurs, pas de créateurs d?entreprise. Aussi longtemps que la France misera sur l?économie de marché, elle devra tout faire pour favoriser les candidats à la fortune capitaliste. Et tant mieux s?ils ramassent de gros dividendes. Il faut que l?audace paie (1). » Parallèlement à cette vieille mise en cause de la fonction publique, de son « archaïsme » et de ses « privilèges », les lucratifs cumuls qui favorisent une gigantesque concentration de pouvoirs (et de jetons de présence) au profit de quelques dizaines de « capitaines » de la finance et de l?industrie font l?objet d?un silence qui doit tout à la pudeur - et rien à l?information... Tout en reprenant certains thèmes (le fonctionnaire planqué, absentéiste, inutile) de la vieille critique, courtelinesque, des bureaucrates du XIXe siècle (2), le discours dominant s?en distingue, de façon radicale, sur plusieurs points. D?une part, les positions de pouvoir des artisans de l?entreprise (hauts fonctionnaires, grands patrons, journalistes) confèrent à la critique une légitimité, au moins apparente, bien plus grande qu?au siècle dernier. C?est l?élite « sérieuse », « réaliste » et « informée » qui parle et gouverne le propos. D?autre part, l?utilisation des moyens modernes de communication assure une diffusion du message, un modelage des consciences d?une efficacité sans précédent. Enfin, et surtout, le ton et les objectifs ont changé. Là où un Courteline brocardait avec un sens du comique et un talent avérés Messieurs les ronds-de-cuir sans en tirer de réelles conclusions politiques, le discours qui prend son essor dans les années 1980 n?a guère le sens de la plaisanterie et relève d?une propagande agressive et politiquement très orientée. En usant de tous les procédés (présentation tendancieuse de données statistiques, amalgames, simplismes, mensonges), il s?agit de faire des fonctionnaires de véritables boucs émissaires au service des visées néolibérales : réduction des budgets publics, privatisations, précarisation de l?emploi, remise en cause des retraites, etc. Essentielles à la mise en place de la société de marché, les principales fonctions de ce matraquage doivent être décrites, tant du point de vue des mécanismes de conditionnement de l?opinion que dans leurs effets réels sur l?Etat, les politiques publiques ou le mouvement social. Il s?agit, d?abord, de faire fonctionner au plus bas coût possible les services publics et faciliter ainsi, à plus ou moins long terme, leur privatisation. En présentant, le plus souvent sans la moindre déontologie, l?évolution comparée du salaire moyen dans le public et dans le privé, en rabâchant que, « dans le match », les fonctionnaires sont les « gagnants » (3), les médias n?ont pas seulement contribué à exciter la jalousie des salariés du privé. Ils ont aussi grandement freiné les revendications salariales dans la fonction publique. A telle enseigne qu?au cours des deux dernières décennies, la part des dépenses induites par la fonction publique d?Etat dans le PIB, c?est-à-dire la fraction de richesses que consacre la France à l?entretien de ses fonctionnaires d?Etat, a diminué de 10,5 à 8,5 %. Ce qui signifie qu?ils coûtent à la nation, proportionnellement à sa richesse, 20 % de moins en l?an 2000 qu?en 1980. Inutile de préciser que ces résultats, pourtant aisément consultables dans les rapports annuels du ministère de la fonction publique, n?ont jamais, eux, fait l?objet du plus petit entrefilet... Une logique identique a prévalu dans le domaine des moyens matériels et, plus encore, des effectifs. A force de ressasser qu?« ils sont trop nombreux », on en est arrivé à la situation inverse : ils ne le sont pas assez. Et ce dans tous les secteurs vitaux. Justice, police, santé, éducation, transports, caisses de sécurité sociale ou d?allocations familiales, inspection du travail, prévention des risques technologiques, on n?en finirait pas d?énumérer la liste des services publics qui souffrent d?une pénurie, plus ou moins dramatique, de personnel. Seules exceptions, remarquables : les privilégiés des hautes sphères de l?Etat, l?Elysée, Matignon, les cabinets ministériels. Ce qui ne manque pas de piquant et s?avère, en fait, comparable à la situation qui prévaut dans les grands groupes privés. Plus « ça enfle » en haut, dans les équipes de direction, plus « ça dégraisse » en bas, aux niveaux intermédiaires et inférieurs de l?entreprise. On assiste depuis vingt ans à une politique délibérée de pénurie qui fait de plus en plus reposer le fonctionnement des services publics sur la bonne volonté des salariés. Parce que la demande de la population ne cesse de croître et de se diversifier, ceux-ci se trouvent pris entre le marteau de la rigueur financière et l?enclume des besoins, pressants ou nouveaux. Piégés par leur sens du devoir et de la solidarité, ils consentent un peu partout à un surcroît de travail exercé dans des conditions de plus en plus difficiles, dangereuses, insatisfaisantes. Tout en attisant le mécontentement des usagers et en préparant ainsi le terrain aux privatisations, cette situation provoque des conflits sociaux à répétition auxquels il est généralement répondu par des discours trompeurs sur le redéploiement des effectifs - comme si celui-ci pouvait encore faire face au problème - ou par des plans de créations d?emploi aussi insuffisants que très bien exploités sur le plan médiatique. Il ne faudrait surtout pas croire que cette politique est en voie d?abandon. Bons élèves de la contrainte des marchés financiers, signataires du pacte de stabilité budgétaire européen ou prêts à discuter des privatisations dans le cadre de l?Accord général sur le commerce des services (AGCS) à l?Organisation mondiale du commerce (OMC), nos gouvernants parient désormais sur l?accélération des départs à la retraite pour réussir le dégraissage des effectifs publics qu?ils n?ont pu obtenir par attaque frontale, comme dans d?autres pays. Pari explicite et à court ou moyen terme dans le camp des ultra-libéraux et des libéraux, hypocritement dénié et plus étalé dans le temps chez les sociaux-libéraux. Un autre objectif, capital, du matraquage est de rogner ou privatiser les droits attachés à la condition salariale. Dans cet esprit, tout droit, du plus minime au plus fondamental, est qualifié d?« avantage », de « privilège ». Ce coup de force des mots, cette fantastique entreprise de culpabilisation ne sont bien sûr pas destinés aux seuls agents du secteur public. Ils visent l?ensemble des salariés. Ainsi commence-t-on généralement, dans les innombrables dossiers que consacre la presse aux « privilèges des fonctionnaires », par s?en prendre au célèbre maquis des primes et indemnités publiques. Afin d?y dénicher quelque sac de charbon des mineurs, indemnité chaussures des facteurs, prime d?entretien du matériel des employés des cimetières ou prime d?égout des conseillers d?Etat. Facile à faire, toujours drôle en raison des multiples absurdités que recèle ce maquis, ce premier florilège a en fait pour but de « chauffer » le lecteur, de le mettre en condition pour d?autres découvertes, supposées plus sérieuses. A l?image des voyages gratuits pour le personnel de la SNCF, des rabais consentis sur le prix de l?électricité ou du téléphone à EDF et France Télécom ou des colonies de vacances subventionnées par les comités d?entreprise des sociétés publiques mais aussi privées. A ce stade, il devient alors possible de s?attaquer aux conquêtes sociales les plus précieuses. Les retraites, d?abord, à propos desquelles nul n?ignore plus les solu- tions « équitables », « réalistes » et « modernes » : il faut niveler par le bas en ramenant le public au niveau du privé et les livrer, via les fonds de pension, aux appétits du capitalisme et aux fluctuations de la Bourse. La stabilité de l?emploi, ensuite. Garantie à vie du fonctionnaire, protection relative du contrat à durée indéterminée dans le privé constitueraient des « privilèges », des « droits acquis » d?un autre temps. Le « normal », le « compétitif » seraient désormais, que nous le voulions ou non, la précarité, l?insécurité de l?emploi. Si, pour l?instant, tous les autres droits ont plutôt bien résisté, force est hélas de constater qu?en ce qui concerne la stabilité de l?emploi il n?en a pas été de même. L?emploi précaire a crû dans des proportions considérables dans le privé mais il a également beaucoup progressé dans la fonction publique. A tel point que près de 25 % des salariés du public (1,3 million sur 5,5 millions) sont contractuels ou précaires. En même temps que s?effectuait ce grignotage, on a vu disparaître du centre du débat intellectuel ou social sur le travail toute référence positive à la stabilité de l?emploi. Comme si, au fond, cela faisait « ringard »... Une entreprise de division
Or, qui n?en connaît les bienfaits ? Condition indispensable quoique non suffisante de la liberté d?expression, au travail comme ailleurs, la stabilité de l?emploi est aussi ce qui permet, accompagnée d?un salaire décent, d?avoir une vie confortable, ouverte sur l?avenir, faite de projets pour soi-même ou ses proches. Projets qui sont bénéfiques à l?économie et à la société et évitent que celle-ci ne se transforme en un champ de méfiances, de frustrations, de violences. Rien n?oppose, contrairement à ce que l?on entend souvent dire, la stabilité de l?emploi et cette autre valeur, très prisée, qu?est la diversité. Bien au contraire, c?est souvent quand on a l?assurance de la stabilité que l?on peut sereinement envisager « autre chose », qu?il s?agisse d?innover sur son lieu de travail, d?entreprendre une activité « à côté » ou de se divertir. Bref, comme les retraites, la stabilité de l?emploi n?est pas seulement une conquête sociale pour laquelle des générations se sont battues. Elle est une valeur de civilisation qui rend la vie et la société véritablement humaines et vivables. Troisième fonction : diviser la population afin d?empêcher la formation d?un mouvement social large et unitaire. Des incessantes comparaisons des conditions des salariés du public et du privé à la rengaine sur les « usagers-otages », des syndicats de fonctionnaires « gréviculteurs » à « l?indispensable service minimum », on a, là encore, cogné dur. Avec des résultats contradictoires. D?un côté, l?offensive a fait la preuve de son efficacité et contribué, avec bien d?autres facteurs, à la fameuse atonie du mouvement social durant les années 1980, lisible dans la très forte chute des grèves au sein des entreprises du secteur privé et semi-public. Alors que le chiffre moyen annuel de journées non travaillées s?y élevait dans les années 1970 à 3,5 millions, il n?était plus que de 1,3 million dans la décennie suivante (4) ! De l?autre, l?entreprise de division a été si grossière qu?elle a, dans un délai finalement assez court, été retournée à l?envoyeur sous la forme du « Tous ensemble ». En témoignent le soutien populaire au mouvement de 1995, les manifestations unitaires de 2001 sur les retraites ou les fronts communs « élus-fonctionnaires-salariés du privé-usagers » qui se sont multipliés ces dernières années pour défendre le service public et l?emploi. Autrement dit, tout ce qui irrite voire rend haineux les ultra-libéraux. Ultime objectif : éviter la remise en cause des véritables privilégiés de nos sociétés. Soit ces journalistes stars grassement rétribués pour leur travail de modelage de l?opinion, ces hauts fonctionnaires des « fromages de la République » ou des postes de direction des institutions européennes et mondiales, ces patrons des grands groupes au train de vie proprement hallucinant (salaires extravagants + jetons de présence juteux + stock-options à satiété + pactoles de licenciement + retraites somptueuses + avantages en nature surabondants + évasion fiscale légale ou illégale...), enfin, ces détenteurs de méga-fortunes habitués des palmarès et des fondations-alibis. Pour ces riches et ultra-riches, le traitement médiatique s?avère singulièrement moins vindicatif que pour les fonctionnaires. Certes, on dénonce bien leur suffisance, leurs prébendes, leurs gains boursiers phénoménaux ou l?on met en cause les plus corrompus d?entre eux. Mais en même temps, à coups de portraits flatteurs du « manager de l?année » ou de reportages télévisés sur leurs habitudes de luxe, on entretient, par-dessus tout, la fascination de l?opinion pour leur argent et leurs privilèges. On cultive également le leurre de la transparence, sans autre effet que la transparence elle-même. Enfin on sait omettre, quand il le faut, quelques données particulièrement gênantes. Tel est le cas des cumuls de postes de direction et d?administration des grandes entreprises. Régulièrement abordé par la presse, grand public ou spécialisée, le sujet peut sembler rebattu. Or il n?en est rien car la présentation journalistique ne fournit jamais que la partie émergée de l?iceberg (5). Ce travail d?occultation s?effectue par divers biais. D?une part, les journalistes se limitent généralement aux mandats d?administrateur, c?est-à-dire aux personnes physiques qu?on a priées de venir siéger dans un conseil, et évoquent plus rarement d?autres positions telles que celle de membre de conseil de surveillance. D?autre part, ils oublient les mandats de représentant permanent, c?est-à-dire les fonctions d?administrateur qu?occupe un individu dans un conseil en tant que représentant d?une personne morale (une autre société). Enfin, il n?est pas fait référence aux multiples postes de PDG, directeur ou gérant mais uniquement au principal d?entre eux. En d?autres termes, c?est une vision très partielle et édulcorée du phénomène des cumuls dans le monde économique et financier que donne la presse. Les raisons de ce mensonge par omission se comprennent fort bien dès lors qu?on s?est procuré ce qui est sans nul doute la bible sur le sujet : le Dafsa des administrateurs, publié chaque année par la société du même nom et facilement consultable (par exemple, à la bibliothèque du Centre Georges-Pompidou, à Paris). A partir de cet épais volume de près de mille pages, nous avons élaboré le tableau qui fournit, sur la base des dernières données disponibles (2000) et au travers d?un échantillon de 50 personnes, une plus juste et complète appréhension du phénomène. Les résultats défient l?entendement. Ils sont 50 et cumulent 397 postes de direction, 491 mandats d?administrateur, 208 mandats de représentant permanent et 117 autres fonctions (conseil de surveillance, présidence d?organismes divers, etc.). Soit au total 1 213 postes et, en moyenne, 24 par individu ! Certains, à l?image des cinq premiers du tableau, sont d?une voracité inouïe et cumulent de 40 à 59 fonctions, le plus souvent à l?intérieur de leur groupe (Yves Carcelle, Patrick Ricard, Philippe Foriel-Destezet, Gérald de Roquemaurel) mais aussi à l?extérieur. Cette année-là, le cinquième, Vincent Bolloré, n?appréciait visiblement pas de ne présider que Bolloré, Bolloré Investissements ou Bolloré Participations. Et donc Fiat France, la Société des chemins de fer et tramways du Var et du Gard, la Compagnie des tramways de Rouen ou celle des Caoutchoucs de Padang figuraient, entre autres, à sa liste de mandats de représentant permanent. En outre, compter, parmi ses treize fauteuils d?administrateur, la Société financière luxembourgeoise, la Société nationale d?exploitation des tabacs et allumettes ou être conseiller de la Banque de France ne paraissait pas non plus l?effrayer. La suite et le milieu du tableau ne sont pas moins instructifs. On y trouve en effet de tout : des héritiers de dynasties politiques (Etienne Pflimlin, 38 postes), industrielles (Laurent Dassault 23, Arnaud Lagardère 21, Olivier Bouygues 19) et financières (Eric de Rothschild 28), des nouveaux venus de l?industrie du divertissement (Michel Guillemot 38, Alain Weill 22) ou du sport (André Crestey 29). Ou bien encore des femmes qui, tout en détonant dans ce milieu dominé par les hommes, ne manquent pas d?un solide appétit : Brigitte Gauthier-Darcet d?Europe 1 (31), Gilberte Lombard du Crédit commercial de France (28). La permanence des héritiers
Plus bas encore, on peut vérifier la règle selon laquelle on peut cumuler moins que ses congénères - mais encore énormément - tout en étant beaucoup plus célèbres qu?eux. Tel est le cas de la lanterne rouge, le « multicartes » Alain Minc, dont les dix territoires portent la marque de sa longue amitié avec François Pinault et de ses affinités mondaines : président de sa société AM Conseil, il était alors aussi président du conseil de surveillance du Monde et de la Société des lecteurs du journal, administrateur de la Fnac, de Mk2, de Moulinex, de Valeo et de Vinci, membre du conseil de surveillance de Pinault-Printemps-Redoute et de Yves Saint Laurent Parfums. Comment oublierait-on Ernest-Antoine Seillière qui n?hésitait pas à ajouter à la présidence du Mouvement des entreprises de France (Medef) seize autres fonctions : président de la Compagnie générale d?industrie et de participations et de Marine-Wendel, vice-président de Cap Gemini, conseiller de la Banque de France, administrateur chez Eridiana Beghin-Say, Gip, Valeo, à la Société générale et à la Société lorraine de participations sidérurgiques, membre du conseil de surveillance de Gras Savoye et Cie, Hermès international, Oranje-Nassau Groep et Peugeot, représentant permanent enfin chez Stallergenes, Bio-Mérieux Alliance et au Bureau Veritas chargé de la classification des navires. Et donc, jusqu?en 1998, de l?Erika... Tous enfin, loin d?être ces simples représentants de l?« exception française » que se complaît à décrire la presse, témoignent des dynamiques actuelles du capitalisme : internationalisation et prolifération des activités au sein des grands groupes qui contribuent à l?augmentation du nombre de sociétés et donc de postes à pourvoir, financiarisation et émiettement croissants de l?actionnariat qui y concourt également, interpénétration du capital public et privé au travers des prises de participations croisées, etc. Mais ils en traduisent aussi les permanences. Par la présence, on l?a vu, de maints héritiers ou une concentration du pouvoir en, finalement, très peu de mains : pour passer de l?échantillon représentatif à la réalité, il suffirait de multiplier les noms par quatre ou cinq tout au plus... Ce qui permettrait, en définitive, de poser à tous ces ultra-privilégiés quelques questions discourtoises mais essentielles. Etes-vous certain, à cumuler ainsi, de bien respecter la loi sur les sociétés ? Comment faites-vous pour assumer quotidiennement les différentes fonctions attachées à chacun de vos postes ? Et combien d?argent en retirez-vous au total ? Histoire de poursuivre l?oeuvre de transparence et de disposer de données exploitables pour l?instauration d?un plafond de revenu. Il existe bien un revenu minimum d?insertion (RMI). A quand un revenu maximal de solidarité (RMS) ?
PIERRE BITOUN
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