Amibe_R Nard | lloyd57 a écrit :
comment faites-vous pour trouver l'inspiration en face de la page blanche?
en ce moment, je suis en vacances et je comptais écrire. L'inspiration ne vient pas. Prenez vous des aides pour y remédier? Je regarde la télé presque toute la journée pour trouver une histoire d'où s'inspirer, je bois un peu d'alcool parfois. J'essaie aussi de me souvenir de mes rêves. Comment faites vous ? si vous prenez des aides, quelles quantités?
Vos études (de lettres?) vous aident elles? Je ne crois pas en leur utilité parce qu'en ayant fait, j'ai remarqué qu'en changeant de méthode de préparation, j'étais plus inspiré.
avez bvous une définition de la page blanche? la craignez vous?
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Salut Lloyd57
La page blanche, cette inconnue.
Oublie la télé, c'est une mauvaise solution, trop de passivité.
Va plutôt marcher une demi-heure, c'est ce que font tous les écrivains.
C'est dans l'action que l'on crée, pas dans la passivité. Et la télé, c'est creux... Ok pour les rêves.
Non pour les aides. Tout ce qui bouffe le cerveau est mauvais.
Et si on commence, c'est la spirale... on ne pense plus être capable de créer hors des produits, donc on rajoute au rajout et le cerveau dérape dans la dépendance destructive.
Les études n'aident pas, même si elles contribuent par les connaissances littéraires (soit par les lectures) elles n'aident pas à écrire.
Si tu n'écris pas, j'y vois déjà deux obstacles :
- Tu penses n'avoir rien à dire.
- Tu penses que ce que tu vas écrire ne vaut rien.
C'est doublement faux.
La preuve, tu viens déjà d'écrire pour poser ta question
Et tu te moques bien de la façon dont c'est écrit.
Le fait que tu prennes parfois de l'alcool pour t'aider est, pour moi, une preuve supplémentaire : tu mets le juge avant l'écriture !
Et tu oublies que tu es seul à écrire. (Si c'est la solitude qui t'ennuie, chercher un atelier d'écriture, on en trouve plusieurs sur le Web)
Oui, tu es seul à écrire devant ta page blanche, personne ne regarde ce que tu dis. Alors lâche-toi sur ta feuille, gribouille, ne cherche même pas à revenir en arrière pour corriger quoi que ce soit... ça tu en auras le temps plus tard
Tu as besoin d'acheter une boîte de kleenex, tu le marques entre tirets et tu continues ton texte en suivant.
Tu as aussi le problème suivant (connu en atelier d'écriture) : Trop de liberté tue la créativité.
"La liberté fait peur, la page blanche fait peur. Une contrainte limite le champ d'action, bien sûr, mais c'est bénéfique. Cela permet d'approfondir les choses mais aussi d'explorer ailleurs. C'est un peu mystérieux, le fait que la contrainte donne de la liberté. Une contrainte est malgré tout une souffrance puisqu'il faut se conformer à des règles. Donc c'est paradoxal, mais ça marche.
De toute façon, le grand secret d'un écrivain, c'est de rayer, d'élaguer ! Mais c'est difficile de faire passer cela aux participants."
Comme tu n'as pas de finale à ton texte (peu importe la finale), tu ne peux pas commencer. Et c'est normal.
Tu veux une finale ?
- Et il embrassa le chien sur la bouche, comme il l'avait promis.
Livrée franco d'une page blanche. Lol
Toujours pas convaincu ?
Allez, je t'en rajoute une couche.
Grammaire de l'imagination - Gianni Rodari
"Le héros d'une nouvelle d'Heinrich Boll intitulée Loin de la troupe (Le Seuil, 1966), parlant des « cahiers de coloriage » de son enfance sur les pages desquels « ne figuraient que quelques traits et parfois même seulement des points à relier entre eux par des traits », remarque que cela lui laissait une grande liberté d'invention tout en la stimulant au départ. « J'usais toujours largement, précise-t-il, de cette faculté de transposition. Au grand effroi de ma mère, d'une silhouette nettement destinée à représenter un cuisinier je faisais un chirurgien en train d'opérer. Il est évident que la présence de quelques contours auxquels des points habilement disséminés assignent une certaine orientation autorise une liberté bien plus grande qu'une page blanche, prétendu symbole de liberté absolue, ardemment convoitée parce que censée laisser toute latitude à l'imagination. »
C'est précisément ce que fait Rodari, mais en allant plus loin, en montrant justement à l'enfant qu'il ne faut pas craindre de faire éclater les stéréotypes, que l'image d'un cuisinier est parfaitement transformable et ne peut que gagner à être transformée en chirurgien et en bien d'autres choses encore, que l'acte d'imagination est une façon de prendre du recul par rapport au réel, de remettre le monde en question, de le modifier en profondeur."
Là, tu as deux indices :
- transposition (ok, tu as regardé la télé, prends plutôt ton programme télé, récupère une intrigue un peu développée, celles des films du soir, et à toi d'écrire l'histoire avant d'allumer la télé pour contrôler si tu as bien deviné ce qui allait se passer...)
- Plusieurs points ?
" Il est évident que la présence de quelques contours auxquels des points habilement disséminés assignent une certaine orientation autorise une liberté bien plus grande qu'une page blanche, prétendu symbole de liberté absolue, ardemment convoitée parce que censée laisser toute latitude à l'imagination. »"
Prends deux films et mélange-les... Prends un journal avec des faits divers, mélange-les pour en faire une seule histoire.
Prends ton héros, projette le fait divers dans ton monde... et en avant l'écriture.
Prends des mots au hasard dans un dictionnaire et intègre-les dans ton récit ou construis-en un de toute pièce (ça porte le nom de logo-rallye)
Certes, ce n'est peut-être pas ce que tu souhaitais écrire pour démarrer, mais ça tient du principe de la cocotte-minute. Quand ton esprit bouillonne, quand il est en action, la vapeur pousse la machine.
Tu le notes toi-même : " j'ai remarqué qu'en changeant de méthode de préparation, j'étais plus inspiré."
Et alors ?
Tu ne vois pas que tu t'es donné un conseil qui t'est propre
Dernier truc en date que je viens de lire pour lutter contre la page blanche.
On écrit sur la page : Je n'écris pas. Je n'écris pas. Je n'écris pas. Je n'écris pas. Je n'écris pas. Etc.
Jusqu'à ce que l'esprit capte autre chose et en ait assez de recopier la même chose... Oui, recopier c'est dément... mais c'est le mouvement qui importe.
Tu n'as pas d'inspiration, parce que tu ne poses pas le premier mot.
Tu aimes bien un auteur, recopie les premières pages (oui, c'est un gros blocage là ) et continue sur la lancée jusqu'à atteindre le texte qui t'intéressait.
Pour éviter la panne, le plan.
Gilbert Gallerne, je suis écrivain.
Rédiger un plan avant de commencer à écrire.
"Un tel plan vous sera utile, certes, mais au petit matin devant la feuille blanche vous vous demanderez « Bon. Jacques rencontre Janette et l'invite à dîner. Mais où se rencontrent-ils ? Quel est leur état d'esprit ? A quoi me sert ce dîner dans mon récit ? Dans quel genre d'endroit l'emmène-t-il ? »... autant de questions qui retarderont le moment où vous attaquerez effectivement la rédaction.
Entendons-nous bien. Peut-être est-ce ce qu'il vous faut. Peut-être travaillerez-vous mieux ainsi, de même que certains préfèrent travailler sans plan afin de ne pas se raconter deux fois la même histoire... Mais peut-être également est-il préférable pour vous de tout prévoir afin de vous faciliter la tâche lorsque vous vous retrouverez devant la page blanche.
Ecrire est difficile. Si les écrivains sont tous heureux d'avoir écrit (et encore plus d'avoir publié) j'en connais peu qui disent aimer l'acte d'écrire. En fait, le nom d'Isaac Asimov est le seul qui me vienne à l'esprit."
« Mon seul doping c'est la page blanche. Parfois je commence sur n'importe quoi : "Bonjour, comment ça va ? - Va te faire foutre." Je sais que ça va se décanter, il ne faut pas se demander comment démarrer, il faut le faire. Même mal : aucune importance puisque vous mettez tout ça à la corbeille. Mais vous avez démarré, les gens ont parlé, ils vivent. Et sur cette feuille, il y a peut-être deux phrases de bonnes, que vous garderez. »
René Chateau, Audiard par Audiard. La teinturière (dialogue réel recueilli dans un pressing)
Si tu es devant une page blanche, c'est que tu n'as pas envie de te provoquer.
Mets-toi en action. Tout le reste suit.
MAINTENANT
Bien Amicalement
L'Amibe_R Nard
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