corsicapersempre a écrit :
Les discussions de Hardware.fr vinrent à ma connaissance par Direct 8. Pendant quelques semaines, le site de la chaîne de Vincent Bolloré arborait en une un lien menant ici. En quelque sorte, Hardware et ses fora devenaient le lieu officiel de babillages sur la chaîne. Mes rapports avec le site furent ponctués de renvois (on dit ban ici) au nombre de deux : l'un que j'estimais justifié, par ma virulence lors des émeutes de novembre dernier, et l'autre à propos d'un sujet que j'ouvrais sur la Tribu Ka pour en dénoncer les ravages et qui me semble toujours injustifié et injuste. Je reste d'ailleurs sous le coup d'un ban définitif (ip bloqué) malgré mon retour sous un nouveau pseudonyme.
Ce petit préambule pour se poser une question qui me semble fondamentale : peut-on encore, en 2006, clamer son amour de la France ? J'entends partout qu'elle cumule tous les défauts de la Terre. Qu'elle est quasiment vouée à disparaître. Les Français n'ont pas le moral. Ils ont peur du lendemain et des incertitudes. Nous serions timorés et arqueboutés sur nos "privilèges". De violents sites internet, toute la nébuleuse d'extrême-droite que j'ai fréquentée un temps, profitent à plein de ces moments de dépression. Comme les sectes qui prolifèrent en proposant des schémas de solutions toutes faites, ils engrangent et se donnent l'illusion d'une soi-disant subversion en dénonçant pêle-mêle l'islamisation de la France, le silence des médias sur racisme anti-blanc, concept dont ils sont les inventeurs exclusifs. Ces gens qui vivent dans une France moisie et passéïste vont chercher très loin leur zélotes. Stalker, par exemple, dans son site qui se veut un dissection du corps mort de la littérature française, n'est pas loin de ces extrêmes. Ils sont aussi aidés par des associations anti-racistes débordées sur leur gauche par la radicalisation de certains discours empoignant l'islam comme une épée, qui ne savent plus maîtriser le domaine de la parole. Alors, on navigue entre ces eaux boueuses. Il en est qui apportent le limon nécessaire à la régénaration du rivage, et d'autres qui charrient bactéries et algues tueuses. Quand on sait à peine nager, on ne se préocupe pas de ce qui se trouve sous nos pieds. Et on se laisse embarquer, qui par le Bloc identitaire, qui par France Echos, qui par Vox Galliae ou Liberty Vox, Solidarité alsacienne, sans parler du Front national jeune dont le président a été arrêté parmi les casseurs devant la Sorbonne.
Or, à les observer de très près, on remarque que toute cette nébuleuse qui grossit comme une tumeur cancéreuse se fout de la France à un point rare. Je n'ai jamais lu, sur aucun de ces sites, une déclaration d'amour à ce pays. Ils se disent nationalistes et intrumentalisent la France à leur profit. La France ne devient plus qu'une marrionnette de chiffon dans leurs mains manucurées. Il serait stupide de ne point accorder à quelques individus sincères le bénéfice d'une certaine lucidité sur les rapports humains qui se dégradent, sur la banlieue qui se désespère, sur les centre-villes qui se barricadent, sur les arcanes administratives parfois ubuesques, sur les difficultés de vivre une histoire d'amour simple. Oui, certes, nous sommes englués dans une recherche de nous-mêmes, moi le premier. Est-ce que pour autant, comme le clame à qui veut l'entendre Nicolas Baverez, la France tombe ?
Je ne crois pas à ce diagnostic qu'on nous serine depuis maintenant cinq ans, depuis que Jean-Marie Le Pen est arrivé au deuxième tour de l'élection présidentielle de 2002. J'ai envie d'aimer cette France qui m'a vu naître. De la respecter, pas seulement pour son Histoire, mais aussi pour ce qu'elle est aujourd'hui. Après tout, ce n'est pas parce que certains eurent la folie des grandeurs (Louis XIV, Napoléon) que nous devons rester sur ces paradigmes. Pourquoi cette absolue nécessité de se comparer aux grandes puissances ? Pourquoi ne pas mener notre barque, à notre mesure, avec nos forces, sans tapage ? Ce n'est pas parce que nous avons en ce moment un premier ministre qui ne jure que par le concours de celui qui a la plus grosse, que nous devons entrer dans son jeu, par tous les diables ! On a besoin d'une France apaisée, d'une France tranquille et sereine qui arrête de se regarder dans un miroir. Arrêtons de jouer les divas du monde. Elles finissent souvent par agacer leurs plus fervents admirateurs, avec leurs caprices, leurs amours compliquées. Elles meurent souvent seules, oubliées de tous, dans un mélange de médicaments et d'alcool. Pour reprendre la métaphore si chère à notre Villepin national, il ne sert de rien d'avoir un gros kiki si l'on ne s'en sert pas, ou pire si l'on s'en sert mal. Les couilles, les couilles, les couilles, voilà qu'ils n'ont plus que ce mot à la bouche, tous ces boute-feux à la petite semaine. Ils proclament de grands discours pour soudain voir revenir sur eux, à vitesse accélérée, le boomerang qu'ils avaient lancé. Ca braille, ça tance, ça lance des harangues enflammées, et ça fait pschitt.
Nous, Français modestes, pas toujours très finauds, même parfois un peu cons, et après tout, la connerie est souvent chez ceux qui s'en moquent, réclamons simplement du calme, un pays qui avance, laisse la place à ceux qui en demandent juste un peu. Que les experts (Jacques Marseille, Elie Cohen, et toute la cohorte des apôtres du déclin) se taisent. Ce n'est pas eux qui font avancer la France. Eux la tirent vers le bas en lui tapant dessus à longueur de colonnes de journaux, d'apparitions dans C Dans L'Air, le nouveau salon où l'on cause du moindre TER qui aurait trente secondes de retard. Il est de bon ton de taper sur Jean-Pierre Pernault, de le traiter qui de pétainiste, qui de fossoyeur de l'information télévisée. Mais au moins, lui cherche ce qui en France avance, sans faire de bruit. Ah, la fête à la Mirabelle ou un vin local, c'est sûr, ça irrite ceux qui jacassent. Tracer son sillon lentement mais sûrement, voilà simplement ce que demandent ceux qui aiment leur pays, sans que nous soyons assaillis par les excités de tout bord. Mais peut-être en ces temps où le ridicule n'a plus sa vertu darwiniste, est-ce trop demander...
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