L'Antichrist a écrit :
Je me garderais bien de faire ton devoir (car c'est bien un devoir de terminale, n'est-ce pas ?). En revanche, je peux peut-être t'éclairer sur la notion d'opinion !
En tant qu?expression de notre passivité, de notre démission intellectuelle devant les faits (l?opinion ne qualifie pas directement l?idée mais le rapport immédiat et irréfléchie que j?entretiens avec cette idée, d'où la diversité des opinions), et parce qu?elle nous permet de satisfaire notre désir de croire ensemble, de nous insérer dans une communauté en adoptant ses préjugés, l?opinion paraît d?emblée n?avoir aucune valeur face à la vérité. Croyance peu fiable, incertaine, douteuse, fille de l?irrationalité humaine, variable selon les individus, les classes sociales et les coutumes, l?opinion semble avoir toujours tort lorsqu?on l?envisage dans le domaine de la connaissance c?est-à-dire là où il est nécessaire de sortir du vraisemblable qui ouvre en permanence la possibilité du faux. Pourtant, le vraisemblable semble notre lot quotidien. Nous vivons dans le vraisemblable, le probable, le possible. D?un point de vue pratique, il est impossible de douter de tout, de vouloir tout vérifier, car cela reviendrait littéralement à cesser de vivre. Pour vivre, il faut pouvoir agir. Or, pour agir, il faut sortir de l?irrésolution en s?appuyant, non sur le certain, mais sur le plus certain c?est-à-dire sur ce qui échappe à notre connaissance mais que notre " bon sens " reconnaît comme devant vraisemblablement convenir pour la fin que nous visons. Vivre, c?est prendre chaque jour le risque du vraisemblable sans pour autant se laisser prendre au piège de l?habitude mais sans rejeter non plus la possibilité que l?opinion soit vraie.
Si nous ne pouvons nous passer de l?opinion dans le domaine de la vie, faut-il pour autant l?écarter du domaine de la connaissance ? Car, après tout, la connaissance est dans le domaine de la vie. N?y a t-il que de mauvais préjugés dans le domaine de la connaissance ? S?ils mettent souvent en échec la connaissance, celle-ci ne réclame t-elle pas les préjugés, opinions non fondées et indémontrables, comme principes ? Pourrait-on jamais connaître quoi que ce soit, si l'on ne pensait à partir de principes, d'intuitions qui, indémontrables, sont eux aussi des préjugés ? Comme fondements de nos connaissances et aussi de nos actions, ces principes, ces intuitions, ces convictions, ne sont-ils pas bons ?
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