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Discussion des articles (Suite) M. LE PRÉSIDENT. ? Nous en avons fini avec les articles relatifs aux collectivités locales, nous pourrons reprendre à l'article 20, sur lequel nous avons déjà examiné deux amendements. M. LE PRÉSIDENT. ? Amendement n° I-236, présenté par M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste. Compléter le premier alinéa du B) du VI de cet article par une phrase ainsi rédigée : Une photocopie d'une pièce justifiant de l'identité et du domicile du client est jointe à la déclaration. M. BADRÉ. ? Nous proposons, pour lutter contre une fraude difficile à réduire, de rendre obligatoire la présentation d'une pièce d'identité lors de l'acquisition d'un téléviseur, sa photocopie pouvant alors être jointe à la déclaration. M. MARINI, rapporteur général. ? L'Assemblée nationale a repoussé un sous-amendement identique de M. de Courson : est-ce en raison des difficultés techniques d'application ? Il faut pourtant que la redevance soit effectivement recouvrée. Monsieur le Ministre, vous avez parlé d'améliorer le rendement de cette taxe plutôt que d'en augmenter le taux : que pensez-vous d'une telle disposition ? M. LAMBERT, ministre délégué. ? Elle serait très difficile à gérer, car il faudrait transmettre les photocopies au service de la redevance qui aurait à les traiter, dans des conditions peu satisfaisantes. Cela n'améliorerait pas le rendement de la redevance. Je souhaite le retrait de cet amendement auquel je ne suis pas favorable. M. CHARASSE. ? Vous nous faites la réponse, classique, de tout ministre en charge de la redevance ? j'en sais quelque chose. Je suis, moi, partisan d'obliger l'acheteur à présenter une pièce d'identité. Quand j'occupais vos fonctions, je me trouvais, chaque année, réputé titulaire de près de quatorze mille téléviseurs : (marques de stupéfaction) oui, autant d'acheteurs me faisaient la mauvaise plaisanterie de remplir la déclaration à mon nom, et l'avis de redevance suivait ! (On rit de bon c?ur.) M. LAMBERT, ministre délégué. ? Quatorze mille ! Je n'ai pas votre notoriété ! M. CHARASSE. ? Tout le monde peut se présenter chez un revendeur sous le nom de M. Alain Lambert, 139 rue de Bercy, Paris XIIe arrondissement ! Quatorze mille téléviseurs par an lorsque j'étais ministre, ça donne une idée de la perte pour la redevance ! Aussi, peut-être ne faut-il pas le dispositif que nous propose M. Badré, mais au moins obliger l'acheteur à présenter une pièce d'identité, le vendeur pouvant alors transmettre les informations. Je sous-amenderais volontiers l'amendement dans ce sens : n'est-ce pas plus opératoire ? M. BADRÉ. ? Un amendement Badré-Charasse ? Pas mal ! (Sourires.) M. MARINI, rapporteur général. ? C'est bien joli de demander des informations, mais qu'en faire ensuite ? M. CHARASSE. ? Mais c'est trop simple aujourd'hui : n'importe qui peut acheter une télévision en se présentant comme M. Philippe Marini, à telle adresse dans l'Oise? M. MARINI, rapporteur général. ? J'avais compris ! M. CHARASSE. ? Cela ne serait plus possible si l'acheteur devait présenter sa pièce d'identité. Quelle est la difficulté ? On donne bien sa carte d'identité quand on fait un chèque ! M. MARINI, rapporteur général. ? L'intention est louable, mais ce n'est pas opérationnel. Il faut plutôt rechercher quelle part les réseaux de distribution de téléviseurs peuvent prendre à la lutte contre la fraude. Est-ce avec le dépôt d'une pièce d'identité ? Sous une autre forme ? Quelle est la nature de l'information que le vendeur doit communiquer au service de la redevance ? Tout ce circuit doit être organisé, d'une manière acceptable pour tous. Les bonnes intentions de M. Badré ne se sont pas encore traduites dans un dispositif susceptible d'être voté. On doit pouvoir avancer. M. BADRÉ. ? Je remercie M. Charasse pour son offre de collaboration. (Sourires.) Cet amendement peut être retiré, ce n'est pas celui auquel nous tenions le plus sur la première partie de la loi de finances. L'amendement n° I-236 est retiré. M. LE PRÉSIDENT. ? Amendement n° I-270 rectifié, présenté par MM. de Montesquiou et Pelletier. Après le premier alinéa du B du VI de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé : Les établissements diffuseurs ou distributeurs de services payants de programmes de télévision sont tenus de faire souscrire par leurs clients une déclaration sur l'honneur selon laquelle ils sont propriétaires ou possesseurs ou détenteurs d'un appareil récepteur de télévision ou d'un dispositif assimilé permettant la réception de la télévision. M. DE MONTESQUIOU. ? Mon amendement va dans le même sens. M. MARINI, rapporteur général. ? Nous allons être saisis de l'amendement n° I-300 du gouvernement, qui a le même objectif et dont la rédaction est plus complète et précise. M. LE PRÉSIDENT. ? Amendement n° I-300, présenté par le gouvernement. I. ? Après le deuxième alinéa du B du VI de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé : La même obligation s'impose également à toute entreprise qui met à la disposition du public des systèmes d'accès sous condition à un ou plusieurs services de télévision au sens de l'article 95 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, à l'occasion de toute vente, location ou, généralement, toute mise à disposition de ces matériels. En cas de location, la déclaration doit être effectuée à la souscription du contrat et à chaque reconduction de celui-ci. II. ? Dans la première phrase du troisième alinéa du même texte, remplacer le mot : «deux », par le mot : «trois ». III. ? Compléter la deuxième phrase du troisième alinéa du même texte par les mots : «ou preneur à bail ou en dépôt ». IV. ? Compléter la troisième phrase du troisième alinéa du même texte par les mots : «, de la location ou de la mise à disposition selon le cas ». M. LAMBERT, ministre délégué. ? La déclaration sur l'honneur trouve sa limite dans l'absence de portée d'une obligation dénuée de sanction. Un seul pays applique une formule de ce genre, le Japon, et sa performance en la matière n'est pas meilleure que la nôtre. Notre amendement n° I-300 fait le maximum pour renforcer la lutte contre la fraude. Il concerne les entreprises qui mettent du matériel à disposition des clients ? les abonnements ne sont pas concernés. Le mécanisme retenu garantit l'égalité devant l'impôt ; il est de nature à améliorer de 8 millions le produit de la redevance, soit 2,65 %. Nos préoccupations sont connues pour rechercher de bonnes solutions. Celle que je propose nous paraît féconde. M. CHARASSE. ? L'amendement de M. de Montesquiou comporte une erreur de rédaction. Quel sens y a-t-il à exiger de l'acheteur d'un décodeur la déclaration sur l'honneur qu'il possède bien un récepteur de télévision ? Évidemment qu'il en a un ! Il n'achète pas un décodeur pour décorer son jardin. M. DE MONTESQUIOU. ? De fait, ma rédaction peut être améliorée? De toute manière, je fonds mon amendement dans celui du gouvernement. L'amendement n° I-270 est retiré. M. MARINI, rapporteur général. ? Favorable à l'amendement n° I- 300, même s'il peut être amélioré. Le gouvernement tient compte des débats de l'Assemblée nationale ; il tente de faire en sorte que l'assiette de la redevance soit la plus large possible. M. CHARASSE. ? Nous avons déposé un autre amendement, proposant une autre formule, mais nous sommes d'accord sur l'objectif : il est normal que les un million et demi à deux millions d'abonnés au câble et autres T.P.S. ne paient pas la redevance. C'est comme si quelqu'un refusait de payer ses impôts au prétexte qu'il n'a pas d'enfants à envoyer à l'école ! Votre amendement n° I-300 pose cependant le même problème que celui de M. de Montesquiou : on peut donner le nom d'un tiers. M. LAMBERT, ministre délégué. ? Il y a la facture? M. CHARASSE. ? Elle ne fait pas preuve. Il faut sanctionner les opérateurs ! M. ADNOT. ? Je pose en principe que tous les sénateurs sont d'accord pour lutter contre la fraude à la redevance. Notre débat est néanmoins en partie obsolète : avec l'A.D.S.L., on pourra bientôt regarder la télévision autrement qu'avec un poste récepteur. Il aurait été plus juste de supprimer la redevance plutôt que la vignette automobile : celle-ci était proportionnée à la puissance du véhicule et ainsi à sa valeur. On a donc fait cadeau de 400 francs aux propriétaires d'une 4L et de 13 000 francs à ceux d'une Mercedes. La suppression de la redevance, elle, aurait profité aux ménages d'une façon égale. M. Charasse oublie cependant que la vente d'appareils se fait désormais surtout dans la grande distribution. Enfin, l'amendement du gouvernement mentionne une déclaration lors de chaque reconduction du contrat de location. Or cette reconduction est généralement tacite. Vous voulez vraiment imposer cette paperasserie supplémentaire à 10 millions de personnes ? M. ABOUT. ? Je suis frappé de voir combien il est difficile d'améliorer le recouvrement de la redevance. Appliquer la redevance à tous les logements, la lier à la taxe d'habitation, serait la meilleure façon de régler le problème du recouvrement. Une déclaration sur l'honneur permettrait d'attirer l'attention sur ceux qui affirment ne pas détenir de postes de télévision. Ce dispositif permettrait, en outre, de réaliser des économies de personnels : les mêmes agents se chargeraient de recouvrer la redevance et la taxe d'habitation. Les dispositifs proposés sont approximatifs. On doit néanmoins tenir compte des observations de M. Adnot, sur la nécessité de s'attaquer à tous les types de récepteurs ? pas seulement aux postes de télévision et de M. Charasse, sur la vérification de l'identité du signataire de la déclaration, ? mais pourquoi ne pas reprendre son idée de lier redevance et taxe d'habitation ? M. MARINI, rapporteur général. ? La précaution introduite par M. Charasse paraît utile mais nous donnons un avis favorable à l'amendement du gouvernement parce que nous sommes d'accord avec l'objectif du recoupement mais nous jugeons cet amendement encore perfectible d'ici la C.M.P. La commission souhaite travailler avec le gouvernement pour aboutir à la meilleure rédaction possible. Avis favorable, donc, avec cette réserve. M. LAMBERT, ministre délégué. ? Ne voyez aucun orgueil d'auteur si le gouvernement préfère sa rédaction, car l'amendement est perfectible. Le gouvernement est à la disposition du Sénat pour poursuivre le travail rédactionnel en C.M.P. Je suis toujours attentif aux propositions de M. Charasse, un homme d'expérience et un esprit libre. Je considère, toutefois, que le service lié au paiement mensuel d'un abonnement demeure le meilleur moyen d'identification : si le bénéficiaire paie, il est identifiable. La question de l'identification est donc mineure dans le cas de ces services d'abonnement. M. VASSELLE. ? Exact ! M. LAMBERT, ministre délégué. ? Je recommande au Sénat de trouver, avec les députés, une rédaction consensuelle et complète. Compte tenu des divergences exprimés à l'Assemblée nationale et de la convergence qui s'est manifestée ici, vous pouvez aborder la C.M.P. en confiance. J'ai indiqué à M. Adnot que la déclaration est unique lors de la vente ou de la location du décodeur : un renouvellement annuel ne sera pas demandé. Le gouvernement sollicite le retrait des amendements et propose aux auteurs de se rallier à sa rédaction. M. ARTHUIS, président de la commission. ? Les conditions dans lesquelles nous légiférons sont perfectibles. M. MARC. ? C'est le moins qu'on puisse dire ! M. ARTHUIS, président de la commission. ? M. Charasse risque d'aboutir à l'effet inverse de celui qu'il vise. Le professionnel passant contrat s'assure d'ores et déjà de l'identité du co-contractant : une nouvelle déclaration ne s'impose donc pas lors de la reconduction du contrat. Nous ferons un toilettage du texte en commission, afin d'aborder sereinement la C.M.P. M. CHARASSE. ? Aucune sanction n'est prévue si les opérateurs et vendeurs n'informent pas le service de la redevance. J'ai vécu un calvaire en 1990-1991 à propos de mon fichier avec Canal Plus, qui a obtenu une annulation par le Conseil constitutionnel, pour un cavalier, certes, mais j'ai été averti que, représenté, mon dispositif serait à nouveau censuré. Des pressions s'exercent sur le Parlement depuis que le gouvernement a fait part de son intention de lutter contre la fraude. Je suis convaincu que Canal Plus n'appliquera pas la mesure. Il faut veiller à ce que le législateur ne soit pas une fois de plus ridiculisé par la télévision, qui aime tant le faire. M. MARINI, rapporteur général. ? Les pressions sont inacceptables d'où qu'elles viennent et quel qu'en soit le sujet. Nous légiférons pour améliorer l'efficacité de la redevance dans les limites du droit existant. En lien avec le gouvernement, nous rechercherons la meilleure rédaction possible en vue de la C.M.P. Dans cet esprit, je vous demande d'adopter l'amendement du gouvernement. L'amendement n° I-300 est adopté ; l'amendement n° I-151 rectifié devient sans objet. M. LE PRÉSIDENT. ? Amendement n° I-27, présenté par M. Marini au nom de la commission des Finances. Dans la première phrase du A) du VII de cet article, remplacer les mots : «par délégation de ce dernier, aux », par les mots : «, sur délégation de ce dernier, par les ». L'amendement rédactionnel n° I-27, accepté par le gouvernement, est adopté. M. LE PRÉSIDENT. ? Amendement n° I-28, présenté par M. Marini au nom de la commission des Finances. À la fin du premier alinéa du A) du IX de cet article, remplacer les mots : «des chefs des services de gestion », par les mots : «par les chefs des services de gestion ». L'amendement rédactionnel n° I-28, accepté par le gouvernement, est adopté. L'article 20, modifié, est adopté.
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