Une vaste opération de police contre les représentants des Moudjahidine du peuple iraniens en France (principal mouvement d'opposition armée au régime de Téhéran) a été menée mardi dès l'aube en région parisienne dans le cadre d'une commission rogatoire du juge anti-terroriste Jean-Louis Bruguière.
Maryam Radjavi, l'épouse du chef des Moudjahidine du peuple iraniens et désignée par le mouvement comme "la future présidente de l'Iran", figure parmi les 165 personnes interpellées mardi matin en région parisienne, a-t-on appris de source policière.
L'épouse du chef des Moudjahidine Massoud Radjavi, Maryam, ainsi que son frère, le dr Saleh Radjavi, ont été interpellés à Auvers-sur-Oise (Val-d'Oise), dans un ensemble de villas, siège européen du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI). Saleh Radjavi est le propriétaire de cet endroit, a-t-on précisé.
1,3 million de dollars ont été retrouvés dans un coffre de la villa abritant à Auvers-sur-Oise, le siège en Europe des Moudjahidine du peuple iranien, a-t-on appris de source policière.
Une centaine de paraboles et "du très gros matériel informatique" ont également été retrouvés, dans les sous-sols de ce complexe de villas.
Ce coup de filet de grande envergure a débuté peu après 06h00 sur 13 sites, dans les Yvelines et le Val-d'Oise, notamment à Auvers-sur-Oise, mobilisant 1.200 policiers et 80 gendarmes du GIGN, sous la responsabilité technique des policiers du Raid.
Dans le collimateur, des responsables et membres de l'organisation des Moudjahidine du peuple, installés dans des lieux "considérés comme des bases organisationnelles, logistiques et opérationnelles au financement douteux", selon une source au ministère de l'Intérieur.
La commission rogatoire a été émise pour "association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme et de financement d'entreprise terroriste". Elle se situe dans le cadre d'une information judiciaire concernant ce groupe ouverte il y a plusieurs années.
A Auvers-sur-Oise, d'importantes forces de l'ordre ont pénétré mardi vers 06h05 dans un complexe de villas, siège européen du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI). D'autres policiers avaient juste auparavant pris position tout autour de l'endroit.
"C'est la police, nous allons procéder à une perquisition dans le cadre d'une commission rogatoire du juge Bruguière", a lancé à travers un mégaphone un policier, avant que l'opération ne débute et que l'on n'entende de premiers cris s'échapper des lieux.
Des policiers du Raid, de la DST, de l'Office central pour la répression de la grande délinquance financière, ainsi que des hommes du Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), ont participé au coup de filet.
Les interpellés devraient être conduits notamment dans les locaux de la DST et dans une caserne de gendarmerie.
De source policière, on relevait d'ailleurs les "difficultés" logistiques d'une telle opération, qui implique de prévoir plusieurs endroits où conduire les interpellés. Il faut aussi signifier leurs droits individuellement, à des personnes qui mardi matin assuraient pour la plupart ne pas comprendre le français. Trente interprètes de farsi avaient été prévus.
L'organisation des Moudjahidine du peuple iranien figure depuis mai 2002 sur la liste des mouvements terroristes dressée par l'Union européenne, ainsi que sur celle du département d'Etat américain.
A l'origine, cette formation d'inspiration islamo-marxiste a participé à la révolution iranienne en 1979 avant d'être chassée d'Iran et de s'installer, pour partie, en Irak du temps du régime de Saddam Hussein.
En Irak, un cessez-le-feu provisoire est intervenu entre Moudjahidine et forces américaines, mais le 4 juin, les Etats-Unis ont assuré, par la voix du sous-secrétaire à la Défense Douglas Feith, qu'ils n'avaient pas l'intention de s'appuyer sur ce groupe pour renverser le régime iranien. Depuis ce cessez-le-feu, le sort des Moudjahidine est un des sujets de tension entre Iraniens et Américains, Téhéran comptant sur la guerre en Irak pour se débarrasser d'eux.
Avant le début des opérations militaires en Irak la direction des Moudjahidine, installée principalement dans une base à une cinquantaine de km au nord-est de Bagdad, avait commencé à replier certains de ses cadres en Europe et notamment en France, selon des sources diplomatiques européennes dans la capitale irakienne.
Le sort des dirigeants du mouvement, en particulier de Massoud Radjavi, demeurait inconnu, les Américains n'ayant pas mentionné leur présence dans les camps qu'ils ont neutralisé.
Selon un expert européen des services de renseignements, installé au Moyen Orient, Massoud Rajavi pourrait bien se trouver en Europe. "Les Moudjahine utilisent les méthodes des services de renseignements. Il est très facile pour lui d'avoir changé de physionomie, teint ses cheveux, changé son apparence. Il est probablement en train de tranquillement diriger son organisation depuis une ville quelque part en Europe", a-t-il déclaré à l'AFP.