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À partir du 4 décembre 201211, le site d'information en ligne Mediapart publie plusieurs articles affirmant que Jérôme Cahuzac a possédé un compte bancaire non déclaré en Suisse, à la banque de gestion de fortune UBS, jusqu'au début de l'année 2010 (le compte aurait été clos et l'argent déplacé à Singapour avant que Jérôme Cahuzac ne devienne président de la commission des finances de l’Assemblée nationale)12,13. Jérôme Cahuzac dément immédiatement cette information, sur son blog, et par voie de presse14. Le premier article cite le mémoire d'un agent du fisc du Lot-et-Garonne, Rémy Garnier, adressé en 2008 à sa hiérarchie, dans lequel il évoquait "un compte bancaire à numéro en Suisse" ouvert selon lui par Jérôme Cahuzac15. Plusieurs responsables politiques de droite comme de gauche demandent à Cahuzac ou à Médiapart d'apporter des preuves16.
Le 5 décembre, Mediapart met en ligne un enregistrement, présenté comme un échange entre Jérôme Cahuzac et Hervé Dreyfus, son gestionnaire de fortune en 2000, qui corrobore les informations publiées. Sommé de publier ses autres preuves, Mediapart a refusé, en évoquant le principe de la protection des sources d'information des journalistes.
Le même jour, en réponse au député UMP Daniel Fasquelle qui l'interpelle sur le sujet, Jérôme Cahuzac affirme devant l'Assemblée nationale qu'il n'a « jamais eu de compte à l'étranger, ni maintenant, ni avant »17,18. Le ministre reçoit le soutien de l'Élysée, du Premier ministre Jean-Marc Ayrault et des ministres du gouvernement19, et les réactions de l'opposition sont modérées20. Plus tard, François Hollande affirme que Jérôme Cahuzac lui aurait également menti en privé21.
Le parquet de Paris ouvre, le 7 décembre, une enquête préliminaire, à la suite de la plainte pour diffamation déposée par Jérôme Cahuzac contre Mediapart22.
Le 14 décembre, l’administration des impôts demande à Jérôme Cahuzac de signer un document attestant qu’il n’avait pas de compte caché en Suisse. Ce dernier n’a pas donné suite à cette demande23.
Le 15 décembre, Michel Gonelle, ancien bâtonnier du barreau d'Agen et ancien maire RPR de Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), prend contact avec Alain Zabulon, directeur de cabinet adjoint du président de la République, qui fut sous-préfet de Villeneuve-sur-Lot entre 1997 et 199924, pour certifier l'authenticité de l'enregistrement révélé par Mediapart, qui avait été effectué accidentellement sur son répondeur en 2000, Gonelle n'ayant pas raccroché son téléphone après une conversation avec Jérôme Cahuzac. Il se dit également prêt à le fournir à la justice et à témoigner devant un juge25. Alain Zabulon en informe le Président de la République 26.
En parallèle, le 21 décembre 2012, Mediapart révèle que la direction régionale des finances publiques de Paris-Sud effectue des « vérifications approfondies » sur les déclarations de l'impôt de solidarité sur la fortune de Jérôme Cahuzac pour les trois années 2010 à 2012 et « dont la sincérité pourrait être remise en cause »27,28, ce que dément la direction générale des Finances publiques (DGFIP)29 alors que Mediapart maintient ses affirmations30. Jérôme Cahuzac serait soupçonné d'avoir sous-évalué le montant de son appartement parisien, d'avoir déclaré un prêt parental déjà remboursé, et de ne pas avoir déclaré certains biens30.
Le 29 décembre, le directeur de Mediapart, Edwy Plenel, écrit une lettre au procureur de Paris pour lui demander l'ouverture d'une enquête sur le fond des faits qui ont été révélés31.
Le parquet de Paris ouvre, le 8 janvier 2013, une enquête préliminaire pour « blanchiment de fraude fiscale » et confie l'enquête à la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale32,33. Plusieurs personnes susceptibles de détenir des informations seront auditionnées : l'épouse du ministre Patricia Cahuzac, le gestionnaire de fortune Hervé Dreyfus, l'ancien juge Jean-Louis Bruguière, qui a détenu une copie de l'enregistrement, l'agent du fisc Rémy Garnier, qui avait fait part à son administration, dès juin 2008, de ses soupçons sur le compte suisse de Jérôme Cahuzac et d'autres soupçons de fraude fiscale34.
Le 16 janvier 2013, Michel Gonelle est auditionné pendant plusieurs heures par les policiers de la Division nationale des investigations financières et fiscales (Dniff). Il remet une copie de l'enregistrement téléphonique 34.
Le 24 janvier 2013, le Procureur de la République de Paris apprend d'un premier résultat d’expertise de la police technique et scientifique (PTS) que l'enregistrement n'est pas truqué 35.
Le 24 janvier 2013 également, en parallèle à l'enquête conduite par la justice, le ministre de l’Économie et des Finances Pierre Moscovici demande à la Suisse si Jérôme Cahuzac a détenu un compte (à l'UBS) dans ce pays36 : la réponse est couverte par le secret fiscal37, mais d'après Le Journal du dimanche, les autorités suisses auraient exclu que Jérôme Cahuzac ait pu avoir un compte (à l'UBS) depuis 200638, ou qu'il ait pu en fermer un d'après Le Nouvel Observateur39. Cette dernière interprétation serait « inexacte » selon une source judiciaire, citée par une dépêche de l'agence Reuters40, et selon Mediapart. L'interprétation qui avait été faite était celle d'un compte en Suisse, alors que la demande ne concernait qu'un compte à l'UBS sur les 377 banques en Suisse.
Le 19 mars 2013, le parquet de Paris ouvre une information judiciaire contre X pour enquêter sur des soupçons de « blanchiment de fraude fiscale » et « perception par un membre d'une profession médicale d'avantages procurés par une entreprise dont les services ou les produits sont pris en charge par la Sécurité sociale »41,13. Jérôme Cahuzac réaffirme son innocence, démissionne, et explique cette décision par sa volonté de se consacrer à sa défense41. Il est remplacé à son poste par Bernard Cazeneuve, jusque-là ministre délégué aux Affaires européennes.
Le 2 avril 2013, après avoir été mis en examen pour « blanchiment de fraude fiscale et blanchiment de fonds provenant d'avantages procurés par une entreprise dont les services ou produits sont pris en charge par la Sécurité sociale »42, il annonce, sur son site internet, détenir 600 000 euros sur un compte à l'étranger et demande « pardon » au président de la République et au Premier ministre, pour le « dommage causé »43.
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